Dr. M. Diakité : “ Les concessions minières des sociétés, ayant perdu leur permis, reviendront-elles à l’État ou pas ?”
REGARD D’UN UNIVERSITAIRE. Dr. Mory Mandiana Diakité revient sur les actualités marquantes de la semaine en Guinée, en Afrique et dans le Monde en répondant aux Questions de la Rédaction de Farafinainfo.com [ACTU DE LA SEMAINE EN 3 QUESTIONS]
L’universitaire Dr. Mory Mandiana Diakité
« Le président Nguema avait plus à perdre à le maintenir en prison ou résidence surveillée qu’à le libérer, dès lors qu’il avait réussi à légitimer son pouvoir illégalement conquis. »
1) – Que pensez-vous de l’exil négocié du Président déchu Ali Bongo et sa famille accueillis en Angola après leur libération ?

La libération de la famille d’Ali Bongo est intervenue après la visite à Libreville du Président angolais, qui est également le Président en exercice de l’Union Africaine (UA), en l‘occurrence, João Lourenço. Au cours de cette visite, il s’est entretenu avec son homologue Brice Clotaire Oligui Nguema, l’ancien général qui a mené le coup d’État contre (Ali) Bongo avant de remporter une victoire écrasante aux élections présidentielles du mois dernier.
À mon avis, cette libération s’inscrit dans le cadre de la décrispation du climat politique postélectoral dans ce pays. Le président Nguema avait plus à perdre à le maintenir en prison ou résidence surveillée qu’à le libérer, dès lors qu’il avait réussi à légitimer son pouvoir illégalement conquis. Sinon, s’il était renversé pour cause de mauvaise gouvernance, il aurait passé le restant de sa vie derrière les barreaux, ainsi que plusieurs autres membres de la famille Bongo. Mais puisque c’était juste une petite révolution de palais précipitée par son état de santé précaire et les directives qu’il s’était engagé et qui ne rassuraient pas l’ancien maitre, donc, il fallait s’attendre à sa libération. Surtout tout le service rendu à l’Hexagone par cette, donc, il fallait s’attendre à un dénouement heureux à cette situation. Il est maintenant en exil dans un pays socialement et culturellement diffèrent de leur. Ce n’est pas évident même après sa mort, que sa dépouille retourne dans son pays d’origine, à moins que cela ne soit pas une menace pour le régime en place. Car, en Afrique francophone notamment, tout est politique et politiquement interprété et jugé.
« Mais ce sont ceux-là même qui défendent la démocratie qui sont à la base de son échec, notamment en Afrique noire. »
2) – Le Haut Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme a demandé vendredi 16 mai 2025 aux autorités maliennes de revenir sur leur décision de dissoudre les partis politiques et d’interdire toute activité politique dans le pays. Quel regard portez-vous sur cette décision qui ne fera pas que des heureux ? La demande de l’ONU est-elle recevable ?

L’appel du Haut Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme lancé à l’endroit des autorités maliennes de revenir sur sa décision de dissolution des partis politiques, à mon avis, ne fera pas écho. Car, la crédibilité cette institution est sérieusement remise en cause par les autorités de ce pays, qui l’accusent de laxisme face aux groupes indépendantistes et terroristes sévissant dans le nord du pays. Sa plainte par rapport à son drone abattu par l’armée algérienne est sans suite, et qui s’ajoute à une autre sollicitant une enquête sur la complicité de la France dans la dissémination du terrorisme à travers le Sahel, reste sans suite.
Personnellement, je suis de ceux qui soutiennent la dissolution des partis politiques. Il faut absolument refonder l’échiquier politique. La démocratie n’a rien à voir avec un quelconque droit de l’homme ni développement. Les partis sont des instruments de domination de l’Afrique, donc, du néocolonialisme. Ils préparent le pays aux conflits fratricides et au terrorisme violents. Comme la période coloniale, les pays francophones sont plus exposés à l’instrumentalisation à outrance de la démocratie que ceux anglophones. Mais ce sont ceux-là même qui défendent la démocratie qui sont à la base de son échec, notamment en Afrique noir. À qui profite la bonne gouvernance en Afrique ? Les Africains doivent se poser cette question et arrêter de se comporter comme des chimpanzés. En résumé, si c’est la dissolution des partis politiques qui amène la paix et la quiétude dans le pays, pourquoi ne pas le faire alors ? Ce sont ceux qui soutiennent le terrorisme soit directement ou indirectement qui font plus de mal à l’humanité que la dissolution des partis politiques. Vaux mieux faire face à un seul front d’abord, qui est la lutte contre le terrorisme. Ensuite, on assainit le cadastre politique.
» Les concessions minières des sociétés ayant perdu leur permis reviendront-elles à l’État ou pas ? »
3)– Après le Mali, la Guinée fait le ménage dans le secteur minier. Le Général Mamadi Doumbouya, Président de la Transition en Guinée, a officiellement fini par mettre à exécution sa menace en retirant plus de quarante (40) permis d’exploitation à des sociétés minières. Êtes-vous surpris ou pas ? Si oui, vous comprenez cette décision de retrait des permis d’exploitation ?
Le retrait de permis minier à plusieurs sociétés doit être accueilli avec prudence, d’autant plus que ce n’est pas la première fois dans ce pays. Ce problème se pose à chaque fois qu’un nouveau régime s’installe au pouvoir. Si j’ai bonne mémoire, l’assainissement du cadastre minier était à la Une juste quelques mois après l’avènement du CNRD au pouvoir, en fin 2021. Les mêmes maux produisent toujours les mêmes symptômes. Pourquoi ont-elles perdu leur permis d’exploitation ? Qu’est-ce que le gouvernement vise derrière tout cela ? Reste-t-il combien de sociétés encore détentrices de permis et qui sont jugées être dans les normes ? Les concessions minières des sociétés ayant perdu leur permis reviendront-elles à l’État ou pas ? Auront-elles la possibilité de régulariser leur situation pour revenir dans l’ordre et reprendre l’exploitation ? Voilà autant de questions qui se posent et auxquelles je n’ai pas de réponse. Bref, tous les départements sont minés par la corruption, mais celui des mines et de géologie dépasse de loin les autres. Les ressources minières risquent d’apporter plus de malheur que de bonheur à la Guinée. Si ce n’est d’ailleurs pas le cas, au regard du désastre environnement que l’exploitation industrielle et artisanale engendre dans ce pays. L’atmosphère est plus favorable à la destruction qu’à la construction.
Rédaction de Farafinainfo.com
Farafinainfo à l’honneur : Le journaliste Chahreddine Berriah, lauréat


