La répartition des Droits de tirages spéciaux (DTS) était au cœur des débats du Sommet de Paris. Qu’est-ce qu’un DTS? C’est un instrument qui a été créé en 1969. L’idée est de donner la possibilité aux pays de « tirer » jusqu’à un certain plafond des liquidités. C’est à dire obtenir de l’argent disponible immédiatement pour pouvoir financer sa balance des paiements. « Les Droits de Tirage Spéciaux, c’est la monnaie que peut émettre le FMI et qui s’appuie sur cinq grandes monnaies internationales : le dollar, l’euro, le yen, la livre britannique et maintenant le yuan chinois. Le FMI crée de la monnaie en s’appuyant sur les grandes banques centrales internationales » nous apprend Thomas Melonio, directeur exécutif Innovation, recherche et savoirs à l’Agence Française de Développement.
Le Sommet de Paris tenu le 18 mai pour le financement des économies africaines, a été une occasion pour le Président Macky SALL de proposer une nouvelle redistribution de ces fameux #DTS. Face aux partenaires bilatéraux et multilatéraux, notamment la Team Europe, le FMI, la Banque Mondiale, le G20 et la Banque Africaine de Développement, il a plaidé en faveur non seulement d’une « initiative de suspension du service de la dette », mais également d’une « mise à disposition de liquidités pour soutenir les efforts de résilience ».
Selon le Président de la République du Sénégal, « il faut reconnaître et saluer ces efforts qui seront confortés par l’allocation prochaine de nouveaux DTS à hauteur de 650 milliards de dollars $US, dont 33 milliards destinés à l’Afrique ». Toutefois, il soutient que « face à l’impact profond de la crise, ces mesures restent insuffisantes. Rien que pour les pays africains à faible revenu, le FMI estime que le besoin de financement additionnel se situe entre 135 et 205 milliards de dollars d’ici à 2025 ». Aux pays du G20 qui doivent recevoir les 2/3 de ces nouvelles allocations de DTS, le Chef de l’Etat du Sénégal vous demande de réallouer vos quotas « en appui aux efforts de relance des pays africains, sous forme de dons, de prêts concessionnels et semi-concessionnels à longue maturité ».
Toujours selon le Président Macky Sall, « au-delà des solutions conjoncturelles, l’Afrique a surtout besoin d’une réforme de la gouvernance économique et financière mondiale, avec des mécanismes innovants, nous permettant d’accéder aux marchés de capitaux à des coûts soutenables et selon des maturités adaptées aux actifs à financer. C’est une nécessité vitale pour nos économies. Autrement, tous les efforts d’émergence resteront vains ». Pour lui, l’Afrique qui est actuellement à l’étape du processus de développement doit « mobiliser toutes les ressources disponibles pour amorcer l’émergence » car les besoins sont nombreux et urgents, surtout en matière d’infrastructures de base qui exigent des « financements lourds ».
Face aux financiers du monde, il a tenu un langage de vérité en leurs présentant les trois obstacles majeurs qui plombent tous les efforts de l’Afrique. Ces obstacles s’appellent :
- plafonnement de l’endettement (à 70% du PIB pour les pays membres de l’UEMOA) ;
- seuil de 3% du déficit budgétaire à ne pas dépasser ;
- coût élevé des primes d’assurance, à cause d’une perception exagérée du risque d’investir en Afrique, alors même que pour nombre de pays africains, ce risque n’est guère plus élevé qu’ailleurs.
Ces interventions du Président du Sénégal appellent de la part des partenaires financiers du monde une discrimination positive pour l’Afrique. Je dirais même un Plan Marshall pour le continent africain. Pour rappel, le plan Marshall a permis à l’Europe de se relancer après la 2ème guerre mondiale. Ce Programme de rétablissement européen ou European Recovery Program (ERP) était initié par les Etats-Unis pour accorder des prêts aux différents Etats de l’Europe afin de les aider à reconstruire tout ce que la guerre avait détruit.
Ce plan qui porte le nom du secrétaire d’Etat américain, le général George Marshall a permis aux européens de bénéficier à l’époque de prêts de plus de 16,5 milliards de dollars en quatre ans avec des conditions. Ces prêts étaient assortis de la condition d’importer pour un montant équivalent d’équipements et de produits américains.
Certes les contextes ne sont pas les mêmes, toutefois, le monde doit reconnaître qu’à l’instar de l’Europe après la grande guerre, l’Afrique aussi a besoin de ce partenariat gagnant-gagnant à travers les droits de tirages spéciaux pour soutenir ses efforts de résilience.
Talibouya Aidara