Et la porte se referma [SileyeBâ]

« El bab maftouh », la porte est ouverte, voilà une expression connue que par des générations ayant côtoyé ou entendu ceerno Abdallahi Dia (1929-2024). La porte du savoir qu’il gardait grande ouverte au linguiste qui butait sur un vers d’Ibn Malick, au juriconsulte qu’un avis juridique tourmentait et au disciple qu »un verset tourmentait. La vie de Ceerno, c’est presque un siècle de don soi.

 

La tradition nous apprend que dans les cités grecques qu’un homme qui faisait preuve d’intelligence était supposé capable en toutes choses. Il était selon les besoins soldats, politicien, législateur ou philosophe. On rapporte que Socrate, qui n’aimait pas la politique, ne pût éviter d’être mêlé aux discussions politiques. Dans sa jeunesse, il fut soldat. Il étudia les sciences physiques. Protagoras, occupait dit-on, les loisirs que lui laissait l’enseignement du scepticisme à la jeunesse aristocratique, curieuse de connaître les dernières découvertes, à établir un code de lois. Tout le monde devait servir comme jurés et remplir d’autres devoirs.

Ceerno Abdallahi Dia a fait tout cela. Jeune, il fut son service militaire. Il a servi l’État comme administrateur civil, il officiera comme Hakem et Gouverneur. Il connaissait les tribus mauritaniennes avec le détail propre aux initiés.

Mais, il gardera l’enseignement et la transmission du savoir chevillés au corps. Sa voix, elle menait directement à la Voie, celle que le soufi vénère tant: l’Effacement. Attitude qu’il adoptera invariablement depuis sa retraite au milieu des années 80 ans. En vrai maître, il prendra sous son aile des centaines de jeunes en quête de sens de la vie. Il leur offrit la quiétude et l’acceptation du fait sans les plonger dans le fatalisme béat.

Lorsqu’il s’écarta de la lumière des hommes qui voulaient le pousser à la politique, il trouvera dans le cheminement vers Dieu, la Lumière éternelle. Ainsi des hommes vinrent par milliers l’écouter. On les voyait boire ses paroles jusqu’à la satiété. Quand il ouvrait la porte, seul l’épuisement des disciples l’arrêtait. Aujourd’hui, en ce lundi 04 mars 2024, la porte se renferme définitivement. Plus personne ne l’enfoncera :  » Mais il fallait qu’Allah accomplît un ordre qui devait être exécuté, pour que , sur preuve, pérît celui qui devait périr, et vécut, sur preuve, celui qui devait vivre.

Sileye BÂ,

 

Nouakchott, 04.03.2024.

 

Farafinainfo à l’honneur : Le journaliste Chahreddine Berriah, lauréat