Grève des transports en Guinée : Taxis, minibus introuvables et les moto-taxis se frottent les mains

Reportage de Farafinainfo.com réalisé par Odine Bitki & Abdoulaye Baldé

Les chauffeurs des taxis et autres véhicules de transport en commun suivent le mouvement de grève lancé par les propriétaires des véhicules de transport public en Guinée. Encore une fois, il faut rappeler que ces derniers, qui sont évidemment mécontents de l’accord paraphé par les autorités publiques et les représentants des syndicats des transporteurs publics, ont lancé un appel à la grève pour désapprouver publiquement cet accord signé, qui ne tient suffisamment pas compte des conséquences de la hausse du prix des carburants à la pompe. 

«Depuis hier matin (lundi 9 août 2021, ndrl), les taxis, minibus et autres véhicules de transports en commun continuent de briller par leur absence sur les différentes voies publiques de Conakry. De Bambéto à Cosa, on ne voit que des véhicules de la police», a évoqué Mariame Diallo avant de révéler: «Mon oncle a quitté Mamou sur une moto jusqu’à Conakry. Il est rentré à 22 heures, parce qu’il n’y avait pas de véhicule». Même son de cloche chez l’ouvrier François Loua : «Depuis six (6) heures, je suis sorti de chez moi pour me rendre à mon lieu de travail comme tous les jours, mais ces deux jours-ci les conditions sont difficiles, certes, mais nous soutenons les grévistes. En tant qu’ouvrier, nous sommes des témoins des personnes qui se battent toute la journée pour ramener de quoi à manger dans leur famille.

Une gymnastique intellectuellement mathématique  

«Le constant est très amer depuis hier (lundi 9 août). Augmenter le prix du carburant à la pompe revient à rendre la vie difficile pour ses propres citoyens, surtout pour ceux et celles qui vivent des petits métiers (comme nous autres). Les autorités publiques augmentent le prix des carburants à la pompe et imposent le maintien de l’ancien tarif de transport interurbain», a vivement rouspété Mamadou Alpha Diallo, un vieux briscard du volant, qui connaît les rues et ruelles de la capitale guinéenne comme les paumes de ses propres mains avant d’entamer une gymnastique mathématique: «Aujourd’hui, de nombreux jeunes gens de notre pays (Guinée) sont touchés de façon (in)directe de l’arrêt des transports en commun. Achetant 27 litres d’essence à 297.000 Francs Guinéens, si je n’augmente pas le prix du tronçon, je ne pourrais pas avoir la moitié de mon argent dépensé, c’est pour cette raison que nous soutenons la grève, qui est évidemment une noble cause pour tous».  

Les moto-taxis se frottent les mains

«Le malheur des uns fait le bonheur des autres», dit un adage très populaire pour ainsi dire que les moto-taxis sont en train de régner en maître absolu sur les voies publiques de Conakry depuis deux jours. Mieux, ils se réjouissent même de la grève des chauffeurs des taxis, minibus et autres véhicules de transport interurbain. Comme en attestent les dires de Mamadou Sow : «Pendant cette période de grève, nous profitons de l’arrêt de travail des chauffeurs des transports en commun et nous gagnons rapidement beaucoup d’argent. Moi, je ne rends compte à personne et n’étant pas membre d’aucun syndicat, je fixe le prix que je veux : libre au client de tomber ou de rester au bord de la route à attendre encore et toujours un motard !» Même réjouissance chez Naby Touré, propriétaire de moto-taxi : «Je n’apprécie guère la hausse du prix des carburants à la pompe. C’est une mauvaise décision gouvernementale. Nous roulons comme sur des roulettes depuis deux jours déjà sans nos chers amis de transport en commun ! Et les passagers sont obligés de se plier à nos tarifs, parce qu’ils ne peuvent emprunter que les moto-taxis pour se rendre au travail. Et pour cause, nous n’avons pas le temps de marchander.» Et Naby de dévoiler son gain journalier avec un grand sourire aux lèvres : «D’habitude, je gagnais entre 100.000 et 150.000 Francs Guinéens. Ces jours de grève, je gagne beaucoup plus d’argent». À entendre parler les uns et les autres, tout le monde souffre de l’arrêt de travail des conducteurs de transport public, mais les citoyens souffrent beaucoup plus, même si les moto-taxis disent ouvertement tirer profit de ladite grève plutôt de la souffrance de leurs compatriotes clients.

Odine Bitki & Abdoulaye Baldé