DOSSIER – Semaine Mauritanienne de l’Indépendance – Titulaire de deux Masters au Maroc après obtenu avec brio sa Licence en Géographie en Mauritanie. Il faut bien le dire que Guethie Kane a été major de sa promotion avant d’aller poursuivre ses études au Royaume Chérifien. Cette jeune femme, qui est si discrète et efficace, apprécie bien le travail sur le terrain. Rencontre avec une vraie passionnée des questions environnementales …
Comment peut-on vous présenter aux lecteurs du site panafricain Farafinainfo.com ?
Je suis travailleuse, engagée dans ce que je fais et vise toujours le résultat. Je suis passionnée par une bonne gouvernance des questions environnementales. Motivée et déterminée, je n’abandonne jamais, je me relève toujours de mes échecs pour donner le meilleur de moi-même. Curieuse toujours de découvrir des nouvelles aventures.
Parlez-vous de votre parcours scolaire, universitaire en Mauritanie et post-universitaire au Maroc ?
Je suis titulaire d’une Licence en Géographie. Etant major de ma promotion, j’ai obtenu une bourse d’études de l’Etat pour poursuivre mes études au Maroc. J’ai commencé en premier lieu par un Master 1 en Aménagement, valorisation des ressources territoriales et gestion des risques environnementaux au niveau de Fès. Ensuite, j’ai opté pour un deuxième Master au niveau du Centre régional africain des sciences et technologies de l’espace en langue française affilié à l’ONU pour 13 pays francophones. C’est un centre qui a formé pas mal de professionnels et qui répondait beaucoup plus à mes aspirations d’évoluer dans les thématiques changements et l’utilisation des systèmes d’observations de la terre.
Vous parliez déjà de votre retour au bercail avant même de présenter votre rapport de stage au Maroc ?
J’ai toujours pensé à revenir au pays. Donc, rester loin de mon pays n’a jamais été ma priorité. J’ai toujours été active à travers mes multiples consultations avant de présenter mon rapport de stage. Une manière pour moi aussi d’apporter ma pierre à l’édifice, parce que le pays a tant besoin de ses professionnels, même si l’insertion dans le milieu n’est pas du tout facile et il y a peu d’opportunités. Pour motiver aussi mon attachement à revenir, j’ai fait le choix de travailler sur une problématique du pays à travers les questions d’inondations de la ville de Nouakchott. Ces questions constituent une problématique majeure.
Pourquoi vous avez choisi d’aller faire le stage à Dakar au Sénégal, mais pas à Nouakchott, en Mauritanie ?
Mon stage à Dakar a été rendu possible grâce à mon encadrant, un spécialiste mauritanien qui travaille dans les organisations internationales et enseignant à l’université d’Arizona aux Etats-Unis d’Amérique, qui m’a accueilli au sein de l’institution, IFPRI de Dakar. Et à l’époque mon sujet de mémoires a porté sur les problèmes d’inondations de la ville de Nouakchott. Ce dernier – à travers les images satellitaires qu’il maîtrisait,- avait travaillé sur un modèle auquel il avait cartographié les inondations de septembre de 2013
Les vraies raisons de votre retour au pays, en Mauritanie ?
Au fait, je n’ai jamais pensé à rester, même si j’ai eu des propositions pour continuer le cycle doctorat. Vu aussi que j’avais commencé déjà quelques consultations avant de finaliser mon rapport de stage, donc le souci de revenir ne me posait pas de problèmes.
Pourquoi le choix de travailler avec l’ONG internationale, Oxfam ?
Cela paraître que j’ai dévié un peu la thématique à laquelle j’ai eu à travailler sur mon projet de fin d’études sur les problèmes d’inondations ensuite sur la problématique du littoral de Nouakchott, mais au fonds non, car ayant un profil transversal. Les thématiques, environnements changements climatiques et risques de catastrophe, sont évidemment liées. Les multiples sécheresses ont fait qu’il y’ a eu un exode massif des populations vers les grandes villes, qui augmente une pression sur la zone urbaine. Travailler avec l’ONG Oxfam sur le programme, auquel j’ai travaillé, répondait à mon profil et pour moi c’était l’occasion idéale d’être en permanence avec ces communautés même si je découvrais à peine le monde humanitaire et les ONGs. Ce choix a été motivé par la thématique de la RRC (Réduction des Risques de Catastrophes) où je venais tout juste d’appuyer un consultant international, qui avait fait la revue de la stratégie de la Mauritanie sur la RRC financée par l’Organisation Islamique pour l’éducation, les sciences et la culture (ISESCO). Et j’étais déjà imprégnée sur ces thématiques et évoluer sur cela me donnerait beaucoup plus de bases solides. Connaissant que ce cadre d’action de Sendai (une ville japonaise) pour la RRC qui prend en compte en compte le savoir-faire local dans le dispositif donc cette expérience de terrain, me permettrait de lier le niveau stratégique avec le niveau terrain.
Vos motivations pour travailler pour l’ONG internationale, Save the Children ?
Travaillant pour le compte de Save The Children, j’avais comme principale activité l’accompagnement des coopératives maraîchères et l’identification des AGR (Activités Génératrices des Revenus) pour les groupements féminins, vu leurs moyens d’existences touchés par les aléas climatiques. En effet, je commençais à m’intéresser sur le lien du genre et changement climatique, à travers mon expérience de terrain, je commençais à voir les réalités auxquelles les femmes vivaient, parce que les femmes rurales étant les plus vulnérables face aux changements climatiques, et elles manquaient de connaissances sur les techniques adaptées pour leur maraîchage et diminuer leurs vulnérabilités. J’ai été motivée par ce choix du fait que j’ai été consultante indépendante Genre et Changement pour la Cellule nationale de changement climatique, qui préparait sa quatrième communication nationale. Et ma contribution a consisté à faire ressortir la vulnérabilité genre sur l’agriculture, l’élevage et l’habitat, et donner des orientations pour que les stratégies prennent en compte cette dimension, qui est à l’état embryonnaire dans les stratégies sectorielles. Cela m’a permis de faire le lien du niveau général de la consultation et l’aspect pratique où les priorités pour ces femmes se sont les renforcements de capacités et des formations sur les techniques culturales adaptées tout en utilisant aussi les semences adaptées.
Et vous travaillez actuellement pour le compte du Programme Alliance Mondiale Contre le Changement Climatique ?
Actuellement je travaille avec l’Alliance Mauritanienne contre le changement climatique, qui apporte une assistante technique pour le Ministère de l’Environnement et du Développement durable et une assistance aux ONGs, qui exécutent les activités d’adaptions aux changements climatiques au niveau des régions de Brakna, Gorgol, Guidimakha et Assaba.
Quand on a toujours vécu en ville, est-ce facile d’aller travailler et vivre en milieu rural ?
Pas facile mais j’ai aimé le fait de travailler directement avec les populations. Celles avec lesquelles j’ai noué beaucoup de relations, et cela a été une grande expérience pour moi d’être à leur écoute, car ayant travaillé à la mise en place des systèmes communautaires d’alertes précoces pour faire face aux risques climatiques et de catastrophes. Pour moi, la base de la réussite d’un programme réside par l’implication des populations autochtones pour en assurer la pérennité dudit programme et le cadre d’action Sendai pour la réduction des risques de catastrophes proposant des initiatives locales pour ainsi comprendre les différents risques et leurs répercussions sur les populations. Pour ce faire, je m’adapte facilement au contexte et je suis une personne, qui favorise l’écoute de son prochain.
Qu’est-ce que vous aimez en travaillant en milieu rural ?
Quand on est sur le terrain, on comprend déjà les enjeux et c’est vraiment au cœur de la pratique loin de la théorie. Les populations sont modestes et humbles ! Et, c’est très enrichissant pour moi aussi du fait que sur le terrain, on apprend trop vite ! Mieux, on y rencontre des personnes ressources qui partagent avec nous leurs expériences et connaissances empiriques.
Interview réalisée par Camara Mamady