ENTRETIEN SPÉCIAL AVEC… Mohamed Cissé, porte-parole du PEDN (Parti de l’Espoir pour le Développement National), revient sur le congrès du parti et les enjeux de transparence électorale en Guinée. Entre critiques des scrutins passés et propositions pour un système plus crédible, il met en lumière les défis démocratiques du pays.
Entretien réalisé par Hadja Fanta Touré, Journaliste Farafinainfo.com
« Les élections des dernières années étaient plus du théâtre qu’une compétition crédible. »
1) – Monsieur Cissé, vous avez récemment déclaré que le congrès du PEDN a répondu aux standards d’une élection libre, crédible et transparente. Pouvez-vous nous expliquer ce qui a fait la particularité de ce congrès par rapport aux précédents ?
La particularité tient au fait que nous sommes un parti qui s’améliore continuellement. Le congrès prochain sera plus innovant que celui de cette année. En plus, le bureau exécutif national a résolument décidé, pour la réaffirmation de la transparence qui caractérise notre processus, d’associer le ministère de tutelle aux processus de vote. L’autre touche de cette année est la retransmission en direct du processus de vote et de communication des résultats.
2) – Vous avez mentionné la transparence des résultats, en la comparant aux élections nationales récentes en Guinée. Que pensez-vous des élections qui se sont tenues récemment ? Quels sont, selon vous, les principaux défis que la Guinée doit encore relever en matière de transparence électorale ?
Les élections des dernières années étaient plus du théâtre qu’une compétition crédible. Les sièges de l’Assemblée Nationale étaient partagés entre les laquais et pseudo-opposants.
Le défi est celui de la transparence, de l’éthique et du respect des expressions citoyennes. L’on ne doit pas continuer à mettre du mouchoir dans l’urne et voir le pigeon en sortir. Ça devient de la magie, enfin. Il faut oser communiquer le vrai résultat et en assumer la responsabilité devant Dieu et le Peuple.
3) – Dans votre déclaration, vous faites référence à des PV gagnants qui annoncent des résultats très faibles, parfois même moins de 5 % des voix. Pouvez-vous nous expliquer davantage cette situation ? Comment l’acceptation des résultats par les partis politiques pourrait-elle être améliorée ?
Vous savez bien que les partis sont représentés dans les bureaux, à la réception et à la centralisation des PV. Dès la signature des PV et leur affichage, la copie est transmise à notre commission pour imputation dans le système. Quand les PV diffèrent de ceux dont le résultat est mis à la disposition du représentant pour vérification, au fur et à mesure, l’on se demande ce qui s’est passé entre la sortie des PV du bureau de vote et la réception des scellés à la centralisation. Toujours est-il que les enveloppes non scellées ne sont pas remontées pour comptabilisation, mais les enveloppes dont les contenus sont substitués l’étaient bien et intégrées. Il suffisait d’opposer des réserves pour se retrouver dans les mains des FDS.
4- Quels mécanismes spécifiques ont été mis en place par le PEDN pour garantir la transparence et la crédibilité de ce congrès ?
Je crois en avoir donné le processus. Les candidatures sont exprimées et traitées conformément aux critères définis. Les bulletins de vote secret ont été préparés par liste de candidature et déposés dans le bureau de vote, préparé avec des urnes transparentes et sous observation des médias et du MATD. Les congressistes ont été appelés circonscription par circonscription selon l’ordre d’inscription sur la liste de présence pour aller voter. Après le vote, les urnes ont été transportées dans la salle de décompte sous l’observation du MATD et des médias. Dans cette salle, l’opération s’est déroulée devant la tutelle avant la communication des résultats dans la salle du Congrès devant les médias. Toutes les activités de la salle du Congrès en lien avec le vote ont été retransmises en direct sur notre page officielle et celle de certains médias. Vous conviendrez avec moi qu’un tel niveau de transparence et de crédibilité est une première en Guinée, même dans la sous-région.
« La position du PEDN est que l’État prenne ses responsabilités pour éviter la politisation de l’administration… »
5) – Le PEDN a toujours prôné la transparence dans le processus électoral. Quelles sont les mesures que vous proposez pour réformer le système électoral guinéen afin qu’il devienne encore plus fiable aux yeux de la population ?
La position du PEDN est que l’État prenne ses responsabilités pour éviter la politisation de l’administration et l’amener à jouer pleinement son rôle de service public.
Le problème est plus dans le caractère des hommes que dans les textes. Le commis de l’État doit comprendre que ses actions peuvent impacter négativement le pays si elles sont partisanes. Sinon, nous n’avons eu que la société civile à la tête de la CENI, mais vous connaissez le résultat.
6) – Vous avez parlé de l’acceptation des résultats électoraux dans le cadre de ce congrès. Comment le PEDN prévoit-il de renforcer la confiance des citoyens dans les résultats des élections, notamment dans un environnement politique où les contestations sont fréquentes ?
Le PEDN compte le faire en montrant aux dirigeants que le statut ne garantit pas la légitimité et qu’on peut être au sommet du pays sans être dans le cœur et l’esprit du Peuple. Les scores du congrès du PEDN n’auraient pas été publiés si c’était dans d’autres partis. Nous allons distinguer l’administration du gouvernement dans notre conduite politique. La légitimité d’un ministre ne doit pas reposer sur les fonctionnaires de son département, mais sur son lien direct avec les citoyens guinéens. Nous avons l’impression que tous les Présidents considèrent l’administration comme un parti politique ou un mouvement politique, alors que cela constitue un créneau au détournement de deniers publics et à la corruption.
7) – En tant que porte-parole du parti, quelle est votre vision du futur politique de la Guinée, et comment le PEDN se positionne-t-il face à l’évolution politique actuelle du pays ?
Ma vision du futur est celle du PEDN. Quant à lui, il suit les phénomènes avec beaucoup d’intérêt stratégique. Ce n’est pas pour rien qu’il a conçu un plan stratégique fondé sur des hypothèses de tout ordre. Jusqu’à ce jour, les évidences observées s’inscrivent dans les limites de ce plan stratégique.
8) – Dans votre discours, il y a un lien avec les élections nationales passées. Pensez-vous que les leçons tirées de ces élections passées peuvent être appliquées à l’organisation des futures élections en Guinée ?
Pour faire simple, il faut noter que les résultats sont assez décevants. La création d’une institution n’a pas empêché la mainmise de l’exécutif sur la CENI et que le mode de sélection, malgré des communes renommées sur les politiques, a montré que les politiques ont été déterminants dans la qualification de cette institution.
« La meilleure façon de sensibiliser est de montrer l’exemple, et c’est ce que nous faisons au quotidien. »
9) – Le PEDN a-t-il prévu d’autres actions pour sensibiliser les Guinéens sur l’importance de la transparence et de la participation active lors des élections à venir ?
La sensibilisation est une activité hebdomadaire chez nous. La meilleure façon de sensibiliser est de montrer l’exemple, et c’est ce que nous faisons au quotidien.
10) – Enfin, quel message aimeriez-vous adresser à vos partisans et aux citoyens de Guinée qui restent préoccupés par la situation politique actuelle, notamment concernant la gestion des élections ?
Nous leur demandons de garder espoir et d’avoir foi en l’avenir. Dans un contexte d’agitation et de prétention, le mieux est de prendre de la hauteur, d’observer, d’apprendre de l’humain dans toutes ses expressions et de vivre pour sa cause.
H.F.T
Farafinainfo à l’honneur : Le journaliste Chahreddine Berriah, lauréat