Oumou Sy, Artiste-musicienne : «Ma diva Coumba Gawlo ! Ma diva est forte et ne baissera jamais les bras »

Mois de mars, mois de la femme – LA GRANDE INTERVIEW – Économiste de formation, Oumou Sy rêvait de travailler pour une institution financière, mais elle ne se voyait pas assise dans un bureau entre les quatre murs toute la journée. C’est ainsi qu’elle a décidé de suivre le fil de sa passion artistique. Découvrez le fabuleux parcours de cette immense artiste-musicienne mauritanienne et opératrice culturelle…

Présentez-vous aux lecteurs du site panafricain d’informations générales, Farafinainfo.com

Je suis Oumou Sy, artiste-musicienne et opératrice culturelle, originaire de Rosso (Mauritanie). Économiste de formation, membre fondatrice du groupe HARMATTAN, je suis Coordinatrice de Nouakchott Music Action (Association culturelle et Centre de formation de musique et de gestion des techniques du spectacle « NMA »). Je suis également Directrice artistique du festival Culture Métisse et chargée actuelle de la programmation au sein de AYAM (Association YALI des Alumni de Mauritanie).

          «Une très belle opportunité pour le parcours de tous jeunes leaders Africains »

Parlez-nous de votre expérience avec Yali ? C’est quoi Yali ?

En 2017, j’ai participé en tant que Coordinatrice de l’association Nouakchott Music Action au programme américain YALI – Young African Leaders Initiative – dont l’objectif est de soutenir les jeunes leaders africains dans leurs efforts pour stimuler la croissance et la prospérité, renforcer la gouvernance démocratique et améliorer la paix et la sécurité dans le continent africain. Une très belle opportunité pour le parcours de tous jeunes leaders Africains, nous avons eu à faire plusieurs activités, entre autres, la retraite, des cours en classe, des partage d’expériences, des visites de site historique, mise en œuvre des projets communautaires sur le terrain.

Quels étaient vos réels objectifs en choisissant la faculté des Sciences économiques à l’Université de Nouakchott ? 

Sous l’influence de la famille, j’ai fait l’économie que j’ai apprise à aimer, grâce à des professeurs de grandes qualités intellectuelles particulièrement Hamed Youra (pensées économiques), Isselmou (Macroéconomie), le prof de la comptabilité, qui nous fatiguait, (Morte de rire)

A vrai dire, mon rêve était de travailler dans une institution publique ou privée en choisissant (de faire la FSEJ) le cursus dans la FSEJ (Faculté des Sciences Economiques et Juridiques) parmi plusieurs options.

Je me rappelle ma conversation avec mon prof Youra qui me demanda : « Que faites-vous à part les études ? » Je le lui ai répondu la musique. Et il me prodigua ce sage conseil: «Il vous faudra la ténacité pour persévérer (pour réussir)». J’avoue qu’il n’avait pas du tout tort (Morte de rire)

                 « Mon objectif était de poursuivre les études tout en développant mon côté artistique »

Avez-vous changé d’objectifs entre temps pour vous retrouver derrière une guitare au lieu d’être dans un bureau ou une institution financière ?

Je ne dirais pas changer d’objectif mais plutôt choisir de suivre ma passion ! En 2005, j’ai  eu à contribuer à une expérience sur le terrain avec une ONG de la place sur la campagne de lutte contre le choléra et une distribution des kits hygiénique, je me sentais vraiment fière d’être utile et proche de la population. Vu ce que je faisais en terme d’activité avec des regroupes de jeune de ma ville natale. Mon objectif était de poursuivre les études tout en développant mon côté artistique, parce que j’ai toujours considéré les études comme une nécessité dans la construction de l’être et son intellect. Je ne me voyais pas assise dans un bureau entre les quatre (4) murs toute la journée

              « Si tu obtiens ton bac pour l’Université de Nouakchott, viens nous voir ! »

Comment avez-vous été piqué par le virus de la musique ?

Tout a commencé avec Coumba Gawlo Seck, artiste-musicienne sénégalaise. J’ai été séduite par son parcours artistique et emportée par sa voix douce et mélodieuse. C’est ainsi que des amis (es) et moi avons créé un Fan’s Club Coumba Gawlo à Rosso en 2007. Mais l’idée de faire de la musique m’est venue lors d’un concert du groupe Walfadjiri à Rosso en 2008. Oui en 2008, si je ne me trompe pas ! Lors ce concert, j’ai vu l’artiste-musicienne Dioba Gueye (finaliste Prix Découvertes RFI 2015, ndrl) sur scène avec sa guitare. Je me voyais d’ores et déjà sur scène et je me suis dit waouh ! Donc c’est possible de faire ça en Mauritanie. Des choses que je voyais qu’à la télévision. Et je ne me suis pas fait prier pour prendre contact avec les membres de ce groupe en leur disant que j’aimerais faire de la musique. Papis (Koné) me demanda : « Qu’est-ce que tu fais dans la vie ? »  Et j’ai répondu, j’étudie ! Et il m’a dit en guise de promesse : « Si tu obtiens ton bac pour l’Université de Nouakchott, viens nous voir ! » C’est ainsi que tout est parti.

Vous avez été emportée par la voix de l’artiste-sénégalaise Coumba Gawlo Seck ? Racontez-nous cette intéressante histoire ?

Oh que oui ! Coumba Gawlo Seck est mon idole, je suis tombé amoureuse de sa voix et de sa personne, à travers ses chansons : Amadou, Ma Yeur Li Ga Yor, BiineBiine en ce temps, il  y’a eu beaucoup de polémique, mais elle est  du genre à avancer sur son chemin sans se soucier du qu’en-dira-t-on. Donc, je l’ai suivie, je ne rate aucune de ses interviews, ni sortie de ses albums, ni son actualité, etc. Autant vous dire que je ne rate rien d’elle. Son parcours – de femme battante et tenace – m’a beaucoup marqué. Je l’ai rencontrée à Rosso lors de sa tourné «sabar». Une manière de montrer une autre facette d’elle au-delà de la musique : elle est une référence pour la jeunesse africaine. Avec des amies, nous avons créé un le Fan  Club de Coumba Gawlo Seck avec une majorité de femme, mais pas que !  Nous avons mené beaucoup d’activités communautaires, socioculturelles. Avec elle, c’est de l’espoir aussi bien qu’à travers son parcours ou sa musique, le titre «NAGA Cool» « AdounaMomeKumperek le, sama xel samadjégnay» beaucoup d’autre rempli de sagesse et de sens que je ne saurai lister ici  « elle est partie de rien pour arriver  là où elle est aujourd’hui »  c’était ça notre devise, et par la grâce tous les membres de ce Club, qui ont eu à faire des parcours exceptionnels et des carrières exemplaires.

Racontez-nous les circonstances de votre rencontre avec Lamine Kane, votre mentor, comme vous l’appelez ?

J’ai quitté ma ville natale pour rejoindre Nouakchott, dans l’objectif de poursuivre mes études tout en intégrant le milieu artistique nouakchottois.

Alors grâce à Papa Diop de Walfadjiri, j’ai intégrée Nouakchott Music Action comme élève de Papis Koné pour apprendre la guitare, je voyais Lamine (Kane) de temps en temps qui venait nous rendre visite après quelque mois Papis Koné m’informa qu’il y’avait une compétition des jeunes artistes dénommée  «Mauristar » cette compétition m’a rapprochée de Lamine. Il m’a aidé pour la composition et l’arrangement de la chanson intitulée « GueumGueum »

Je n’étais pas sélectionnée, mais à l’issu de ce concours, il m’a coachée, apprise et guidée. Il m’a gardée sous son aile. Ensemble, on a marché côte à côte. Ce qui fait de lui, une des personnes les plus importantes de ma vie « mon mentor », oui il l’est ! Il a fait de moi ce que je suis aujourd’hui tout en me respectant.

Parlez-nous de l’Association AYAM ? Quels sont les objectifs de cette association ?

Association Yali Alumni Mauritanie (AYAM) a été créée en 2017 après le retour de la session 4 dont je faisais partie. AYAM est composée des Alumni de la Mauritanie regroupant l’ensemble des bénéficiaires de la formation Yung Africa Leadership Initiatives (Yali CRL de Dakar), ainsi les Mandela Washington Fellowship (MWF), Yali Network.

Leurs objectifs est de :

  • Former les jeunes mauritaniens sur les techniques de entrepreneuriat et du progrès personnel.
  • Former les femmes non scolarisées sur l’entrepreneuriat
  • Accompagner les structures féminines dans la Gestion de leurs business
  • Élaborer et exécuter des projets ayant un fort impact au sein de nos communautés
  • Promouvoir le sens de la responsabilité au sein de la jeunesse

Comment faites-vous pour concilier vos activités professionnelles (musique, mouvement associatif) et votre vie de femme mariée ?

Tout est question d’organisation et de communication, c’est mon métier et comme tout métier, il y ‘a un temps à tout difficilement dans le milieu culturel (Mdr), mais parfois, il est plus difficile que l’on laisse croire. Mais heureusement pour moi, j’ai épousé un homme extraordinaire et compréhensif, et qui m’encourage à chaque instant dans le boulot. Dès fois même il m’aide à distance dans mes compositions musicales, c’est pour vous dire qu’il est musicien aussi (Eclat de rire) et ce qui concerne la vie associative, c’est mon quotidien.

Quelles sont les dernières nouvelles de votre groupe Harmattan ?

Harmattan, un groupe qui est né d’un rêve collectif de toute une génération sur la scène musicale mauritanienne. C’est dommage de le dire, mais comme beaucoup le savent, il est facile d’être emporté par les effets négatifs du milieu. Harmattan n’a pas survécu.

Qu’avez-vous appris en participant au programme américain  Yali ?

La formation de 5 semaines avec 230 ressortissants de 16 pays de l’Afrique de l’Ouest avait pour thématique le leadership civique. Ce programme était orienté vers ceux et celles qui aspirent à être civiquement engagés. Au cours du programme, j’ai enrichi mes compétences sur la gestion de l’organisation, la planification stratégique, la collecte de fonds, les relations communautaires et la sensibilisation, le plaidoyer, le suivi et l’évaluation, les médias et la création de coalitions. Je me suis servie de ces compétences acquises lors de cette formation pour développer notre association.

Et NMA a eu la chance, j’étais seule à aller à YALI. Il y’a eu Mokhtar Fall le régisseur, grâce à nos efforts, pour l’édition 2018 du Festival Culture Métisse, nous avons monté un partenariat avec la Fondation Music in Africa à travers un autre Alumni Tchadien. Cela nous a permis d’accueillir l’artiste-musicienne tchadienne Mounira Mitchala, Prix Découvertes RFI  2007. Elle a animé des ateliers avec les artistes-mauritaniens et fait des concerts.  Cette rencontre artistique nous a ouvert des portes et permis de participer à la résidence de création à Oujda (Maroc) avec le groupe SNITRA avec le soutien de l’Institut Français du Maroc, Courant du Monde en France «Coopérer & Créer dans le monde francophone», grâce au soutien de l’IFM (Institut français de Mauritanie) et le SCAC, WACCAT Activisme Artistique à Dakar etc.  Et plein d’autres collaborations avec Alumni d’ici et d’ailleurs.

Est-ce facile d’être femme et Chef d’orchestre en République Islamique de Mauritanie ?

Ce n’est pas être femme chef d’orchestre, qui est le plus difficile, si cela se relève d’ordre de capacité et du sens de leadership ! Ce qui est plus difficile en Mauritanie, c’est d’être acceptée comme musicienne, que la musique soit reconnue comme un métier. Le regard social avec tous ces stéréotypes, femme chanteuse peut être « AADI », mais instrumentiste, ça devient autre chose sans oublier ceux qui n’aiment pas  être sous l’autorité de la femme, mais que faire ?! Il faut s’imposer en travaillant dur tout simplement.

Est-ce qu’un Projet culturel en tant que Coordinatrice de projets culturels ?

Coordinatrice ou coordinateur de projets culturels est un (e) spécialiste de la création événements. Travaillant pour une agence de production, une association culturelles, son rôle et de coordonner l’organisation événements. Ainsi, il est chargé de la gestion de Projets culturels, qui se définit comme les expositions, les concerts, les spectacles de danse ou les pièces de théâtre etc. Nous voyons dans le cadre de ce travail, il ou elle est appelé (e) à côtoyer différentes personnes, notamment des artistes, des directeurs de festivals ou de salles et des acteurs politiques comme les maires ou leurs adjoints.

Quel conseil donneriez-vous aux jeunes garçons et filles qui aimeraient vous emboîter le pas ?

Apprenez tant que vous pouvez ! Côtoyez la vie associative ! Ouvrez-vous !  Faites ce que vous aimez faire avec la persévérance et la ténacité, qui sont les clés de la réussite. C’est le conseil que j’avais reçu.

Quelle question aimeriez-vous répondre que nous n’avons pas posée ?

En tant que coordinatrice de NMA « Nouakchott Music Action », j’aimerais vous parlez de NMA et ses actions

OK, on vous écoute !

L’association a pour objectif de contribuer à la promotion de l’art et la culture musicale au sein de la société mauritanienne. Le centre de formation de musique est bien implanté dans l’enseignement musical à Nouakchott depuis 2008 en plus de sept (7) autres régions du pays durant ces trois dernières années. Il accueille de nombreux jeunes aux aspirations très différentes, il crée un cadre propice à la découverte de vocation lié aux métiers de l’art et de la culture, les prépare au professionnalisme, en dispense également des cours pour le plaisir de la pratique instrumentale et collective.

Objectifs

  • Répondre aux besoins d’expression artistique et culturelle des jeunes

Les jeunes à la théorie et à la pratique et

  • Accompagner les musiciens vers le professionnalisme et encourager le parrainage

Techniques et à la gestion des spectacles r les

  • Rencontres entre artistes et favoriser l’ouverture aux différents styles musicaux

Les actions ou projets du NMA :

  • Le festival Culture Métisse
  • Le projet ASECS financé par le SCAC via le programme FAJR 2018 & 2019
  • Le projet CulTours Métisse encours financé par le programme CORIM

 Voir le site : www.nma-mr.org

Page Face Book : Nouakchott Music Action

                              Festival Culture Métisse

                            Art au Service de l’Education et de la Cohésion Sociale

Coumba Gawlo Seck  a annoncé la perte de sa voix ! Comment avez-vous accueilli cette triste nouvelle ?

Mon Dieu ! Imaginez, j’ai eu des larmes aux yeux, savoir que la voix qui m’a touchée et fait découvrir ce que s’est que la musique ! Apprendre que cette voix, qui m’a fait pleurer de joie resterait silencieuse pour un moment. Cette mauvaise nouvelle m’attriste, mais une chose est sûre et certaine « ma Diva Gawlo ! Ma Diva est forte et ne baissera jamais les bras » comme j’ai toujours dit : je l’ai aimée pour sa bravoure, pour tout ce qu’elle représente pour la jeunesse africaine. Donc à nous « Fans » de l’envoyer tout notre énergie en priant pour qu’elle retrouve sa Voix d’Or.

La Grande Interview réalisée par Camara Mamady