Ce lundi 23 octobre 2023, la Rédaction de Farafinainfo.com revient sur les faits marquants de l’[Actu de la Semaine en 3 Questions] en Afrique particulièrement le choix d’Amadou Ba par le Président Macky Sall au détriment de deux autres, les menaces de Mamadi Dumbouya et la supposée fuite du Président Bazoum. Entretien avec Dr. Mory Mandiana Diakité, Ingénieur agronome & DGA chargé de la recherche à l’IIFPIDCA (Institut Itinérant de Formation et de Prévention Intégrées contre la Drogue et autres Conduites Addictives).
«Tous les ingrédients sont réunis pour qu’elles ne se déroulent pas dans un climat apaisé.»
Amadou Ba a été choisi par Macky Sall, Président de la République du Sénégal pour être le candidat de la Coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY) au détriment de l’ancien Premier Mohammed Boun Abdallah Dionne et le Ministre de l’Agriculture démissionnaire, Aly Ngouille Ndiaye. Ces derniers, qui ne digèrent pas du tout de n’avoir pas été choisis, annoncent leur candidature à l’élection présidentielle et semblent décidés à faire mordre la poussière à Amadou Ba électoralement parlant. Que pensez-vous de cette désignation d’Amadou Ba, qui fait grincer les dents ?
Le choix d’Amadou Ba par Macky Sall comme le candidat de la Coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY), intervient dans un contexte crispé par les décisions de justice concernant celui qui fait figure de principal opposant, en l’occurrence le maire de Ziguinchor, Ousmane Sonko. Serait-il ou pas candidat aux prochaines consultations électorales prévues au mois de février prochain ? Seule la justice sénégalaise peut répondre à cette question. Mais que Ousmane Sonko soit candidat ou pas, tout porte à croire que ces élections risquent d’être très agitées. Tous les ingrédients sont réunis pour qu’elles ne se déroulent pas dans un climat apaisé. On risque d’assister à des affrontements violents entre les partisans de Sonko, considéré comme le candidat de la rupture avec les vieilles pratiques de gouvernance et les forces de maintien d’ordre, s’il est exclu, Autrement dit, les résultats seront contestés, souvent violemment, entre les partisans d’un Sénégal pour les Sénégalais et ceux d’un Sénégal rattaché à la France comme toujours et incarné par le candidat de Macky Sall. Mais il est pour le moment extrêmement difficile de prédire une coalition probable entre les ténors de la classe politique pour faire bloc à Monsieur Ba. Bref, dans un monde multipolaire en émergence dans lequel la France ne pèse pas lourd, le scénario Issoufou -Bazoum risque de se reproduire au Sénégal. Et si le choix est erroné, on risque d’assister à un renversement de Monsieur Ba, s’il est élu comme ce fut le cas pour (Mohamed) Bazoum. Cela est d’autant plausible qu’il est choisi au détriment de deux autres ténors de son propre camp, en l’occurrence, M.B.A Dionne et A.N Ndiaye. Ces derniers ne digèrent pas du tout de n’avoir pas été choisis. Ils annoncent leur candidature à l’élection présidentielle et semblent décidés à mettre le bâton dans ses roues. Bref, Monsieur Ba est le candidat de la françafrique à ces élections, alors que Sonko est celui de la rupture avec la vielle tradition de gouvernance de ce pays.
«la CRIEF, elle-même, est fortement décriée par le peuple. Personne n’y fait plus confiance.»
Selon Ousmane Gaoual Diallo, le Président de la transition a mis en garde les ministres par rapport à tout manquement dans leur gestion. Il a rappelé que la CRIEF n’est pas mise en place pour juger uniquement les anciens dirigeants guinéens et que ceux qui sont actuellement aux affaires peuvent aussi être traduits devant cette juridiction en cas de malversations financières. Que pensez-vous de cette mise en garde du Président de la Transition Guinéenne ?
En ce qui concerne la mise en garde du Président de la transition, le Col Mamadi Doumbouya, vis-à-vis de ses ministres, je crois que cela n’est pas un phénomène nouveau depuis l’avènement du CNRD (Comité National pour le Rassemblement et le Développement) au pouvoir, sauf que la CRIEF elle-même est fortement décriée par le peuple. Personne n’y fait plus confiance. On a atteint un seuil où personne ne fait confiance à l’autre. Les gens ne font pas preuve de modestie, qui est un signe de patriotisme. L’incivisme a eu raison du civisme. Et les conséquences de la mauvaise gestion du dénier public, c’est tout le monde qui en fait les frais malheureusement. Mais le Col Doumbouya doit revoir sa copie. Il doit agir pour s’en débarrasser des brebis galeuses. Je suis parmi ceux qui pensent que les élections ne sont pas une priorité pour notre pays pour le moment, mais je suis tout de même pour la bonne gouvernance et pour la prospérité partagée. On ne peut pas faire un coup d’Etat sanglant contre un régime <<démocratique>> pour, dit-on, mettre fin aux pratiques malsaines qui caractérisaient autrefois la gestion du dénier public, et avoir peur des individus. Il ne doit pas se laisser emporter par le sentiment ou l’émotion. Ce n’est secret pour personne que la transition patine, et s’il n’agit pas à temps, elle risque de s’enfoncer davantage au point de ne plus bouger. C’est tout de même aberrant de voir les autres trimballés en justice pour accusation de détournement de dénier public lorsqu’ils étaient aux affaires, et d’en faire autant, voire plus. On doit éviter de donner l’impression que la CRIEF est un tribunal des vainqueurs. Sinon, on n’a pas besoin d’être un sortant des grandes écoles pour bien diriger ou servir son pays. Il faut juste un minimum d’intelligence doublée de patriotisme pour y parvenir. On doit apprendre à servir le peuple et non se servir de lui, comme ce fut toujours le cas depuis plusieurs décennies maintenant dans ce pays. On apprend à la dernière minute que des DAF sont interdis de sortir du pays.
« Il doit être le prisonnier le plus sécurisé de ce pays. »
Le régime militaire issu du coup d’État de juillet au Niger a affirmé jeudi soir que le président déchu, Mohamed Bazoum, avait tenté en vain « de s’évader » en direction du Nigeria. Plusieurs personnes ont été arrêtées et une enquête a été ouverte. Une information de la junte qui a été démentie par le collectif des avocats de l’ancien Président. Que pensez-vous de cette déclaration de la junte militaire au pouvoir au Niger ?
Cette présumée tentative d’évasion de Bazoum vers le Nigeria s’apparente à une accusation de tentative de déstabilisation du pouvoir en place. On peut toujours accorder un bénéfice de doute à cette accusation, en attendant la justice de prouver le contraire en toute indépendance. D’ici là, on ne peut pas trop en vouloir à ceux qui croient à la thèse d’évasion, d’autant plus que ses soutiens ne resteront pas les bras croisés avec sa chute inattendue survenue au mois de juillet dernier. Mais, si cette accusation se relèverait vraie, cela va s’en dire que la complicité est énorme. Car, ce serait extrêmement difficile pour un ancien Président de la République en prison de s’échapper aussi facilement. Il doit être le prisonnier le plus sécurisé de ce pays. Donc, une menace apparente et sérieuse pour le régime en place. En d’autres termes, ce serait suicidaire de leur part d’entreprendre une telle aventure, d’autant plus que la junte qui l’a renversé demeure sur ses gardes quant aux velléités de déstabilisation.
Rédaction de Farafinainfo.com