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Reporter, témoin des faits

Dr. Mory M. Diakité : «Le pouvoir fini, et chacun finira par mourir. Personne n’apportera…»

Ce lundi 01 juillet 2024, la Rédaction de Farafinainfo.com revient sur les faits marquants de l’[Actu de la Semaine en 3 Questions] en Afrique particulièrement le décès de l’ancien Chef d’Etat-Major Général des Armées, le Colonel Sadiba Koulibaly en détention. La visite du Colonel Assimi Goïta, Président de la Transition au Mali au Burkina Faso. Et la colère des jeunes kenyans contre les nouvelles taxes. Entretien avec … Dr. Mory Mandiana Diakité, Universitaire   

 

1) – «Le parquet près le Tribunal de première instance permanent de Conakry a le profond regret de porter à la connaissance de l’opinion publique du décès de Monsieur Sadiba Koulibaly survenu le 22 juin 2024 à Conakry suivant le certificat de décès N°1942/HNID/24 du 24 juin 2024 délivré par monsieur le chef de service médecine légale de l’hôpital Ignace-Deen de Conakry» a annoncé le Communiqué du Parquet près le Tribunal militaire permanent de Conakry. Et ledit Parquet d’évoquer les causes du décès du Colonel Sadiba Koulibaly en ces termes: «Il résulte des conclusions du rapport d’autopsie établi à cet effet que ‘’le décès pourrait être imputable à un psycho-traumatisme important et un stress prolongé qui sont à l’origine d’une arythmie cardiaque majeure ayant entraîné une défibrillation et un arrêt cardiaque’’».  Que pensez-vous du décès de cet ancien Chef d’Etat-Major Général des armées, qui est incontestablement une grande perte pour l’Armée Guinéenne, la Guinée et la ville de Mandiana dont vous êtes originaire ?

La mort subite du Général Sadiba Koulibaly est une perte immense pour la Guinée, particulièrement son armée, dont il a tant servi avec dévouement. Elle a été annoncée dans un communiqué officiel lu le 24 Juin dernier sur les médias d’Etat, dans lequel il ressort que son décès serait dû à une irrégularité du battement du cœur. Le verbe a été conjugué au conditionnel. C’est très important de le souligner. En plus, l’usage du mot : défibrillation dans ledit communiqué, à mon avis, était inapproprié. Car, il signifie un traitement, plutôt qu’une cause pouvant entraîner la mort. Mais jusqu’à preuve du contraire, on ne peut qualifier son décès d’assassinat, car il n’existe pas encore de preuve justifiant cela. Il a été accusé d’atteinte à la sûreté de l’Etat, donc, d’un complot contre le régime en place, et a été condamné à cinq ans de prison ferme dans un procès éclair. Depuis lors, personne n’a plus eu de nouvelle de lui, sauf ce 24 juin où son décès a été annoncé par le gouvernement. Quoiqu’il en soit,  quelle que soit la cause de sa mort, celle-ci découle de l’incompréhension entre des alliés d’hier. De ce fait, mort en détention, on peut considérer qu’il est une victime politique, s’ajoutant à tant d’autres qu’a enregistré  notre pays depuis son accession à l’indépendance, qui, il faut mentionner de passage, peine à se stabiliser politiquement et économiquement. Et c’est cette instabilité sociopolitique et économique qui engendre toujours des violences, souvent meurtrières.

Sinon, on pouvait l’intimer à regagner son poste le plus rapidement possible, ou l’affecter simplement dans une autre ambassade d’un pays ami, où on pouvait contrôler ses mouvements.

Mais qu’est-ce qui fait radicaliser les dirigeants de notre pays ? Sinon,  au départ à chaque prise de pouvoir, que cela soit démocratique ou anti démocratique, les intentions sont toujours bonnes, et qui corroborent avec les premiers actes posés par chaque nouvel homme fort. Malheureusement,  peu à peu, c’est la radicalisation, c’est le règne sans partage, c’est le détournement à ciel ouvert du denier public, c’est la confiscation du pouvoir,  c’est la contestation populaire. Sinon, lorsqu’il y a l’amour entre les citoyens d’un pays, lorsque l’intérêt supérieur de la nation prime sur l’intérêt personnel, c’est évident que la compréhension soit facile entre les fils et filles du pays. Cela n’est possible que si le pays compte pour chaque citoyen. Mais il faut sauver la vie humaine autant que possible. Le pouvoir fini, et chacun finira par mourir. Personne n’apportera avec lui quelque chose de ce monde en allant à l’au-delà.

On doit prier Dieu pour que les uns et les autres reviennent au meilleur sentiment pour un retour à une vie constitutionnelle apaisée dans un délai raisonnable. Si toutefois on est conscient de la volatilité de la situation. La Guinée est un pays extraordinaire, qui défie tous les pronostics. Ne vous en fiez pas. Je suis tout de même conscient qu’il est plus facile d’arracher un pouvoir au bout du stylo qu’un pouvoir au bout de la kalachnikov.

Je termine mes propos par présenter mes condoléances les plus attristées à la famille éplorée. Que l’âme du défunt repose en paix. Amen !

2- «La coopération entre les régimes militaires de l’Alliance des Etats du Sahel (AES- Mali, Burkina, Niger) a ‘’pris un chemin de non-retour’’ a déclaré le chef du pouvoir malien après un entretien mardi 25 juin (2024) à Ouagadougou avec son homologue burkinabé», renseigne France 24. Quels enseignements tirez-vous de cette déclaration du Colonel Assimi Goïta, le Président de la Transition au Mali ?

Effectivement, les régimes militaires des trois pays du Sahel n’ont pas le choix. Pour celui qui suit la situation politique dans ces pays, sait que la normalisation des relations avec la CEDEAO ou leur retour dans cette organisation en manque de légitimité, n’est pas pour demain, au risque de provoquer un séisme politique dans ce vaste espace désertique. La ligne rouge a été franchie à tous les égards. La manipulation est très dangereuse pour un pays et pour une organisation. Elle compromet la souveraineté. Malheureusement, l’Afrique noire est victime de toute sorte de manipulation, depuis l’antiquité jusqu’à nos jours.

Pour rappel, le colonel Assimi Goïta a effectué ce 25 juin 2024 une visite d’amitié et de travail au BurkinaFaso, une première depuis l’arrivée du capitaine Ibrahim Traoré au pouvoir dans ce pays. Les discussions entre les deux hommes d’Etat ont porté sur le défi de la lutte contre le terrorisme et le renforcement des relations entre les pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES). Ces dirigeants sont conscients que la survie de leur pouvoir dépend étroitement de la pacification de l’espace Sahel. C’est-à-dire sa désinfection des terroristes. Cette visite a été une étape importante dans le partenariat entre les deux pays. La présence des ministres maliens de l’Administration territoriale, des Affaires étrangères, des Finances, des Transports et de la Défense ainsi que celle d’une grande partie du gouvernement burkinabé démontrent l’importance que revêt cette rencontre. Assimi a déclaré à la presse que la dynamique est très bonne au sein des trois états, chose qui leur permet aujourd’hui de mener des opérations de façon conjointe, sans entrave. C’est-à-dire que les armées des deux pays sont libres de traverser la frontière pour poursuivre les terroristes, et sur le territoire malien tout comme sur le territoire du Burkina Faso. Alors que cela n’était pas possible  il y a juste deux années en arrière.

Je ne pense pas qu’ils reculeront. Le vin est tiré,  il faut le boire. La seule menace pouvant  salir  leur lutte et remettre en cause de nouveau l’indépendance de ces trois pays, c’est la corruption généralisée, la mal gouvernance. S’ils échouent ce sera fatal pour leurs pays et pour toute l’Afrique noire. L’autre lourd héritage pour ces dirigeants de l’AES, c’est le CFA. Au cours d’une de ses allocutions, Assimi a affirmé qu’ils ne sont pas seulement victimes du terrorisme religieux,  qu’ils font également face au terrorisme  monétaire. C’est-à-dire, la manipulation du FCA pour faire échouer la transition et la lutte contre le terrorisme violent. Mais il fallait être des noirs pour que le CFA prospère en Afrique noire. Pourquoi il ne s’utilise pas dans les pays arabes d’Afrique ?

Bref, l’échec de la démocratie et l’instrumentation du terrorisme ont favorisé le chaos au Sahel et l’effondrement des régimes. Ces régimes déchus ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes. Et la France regrettera pour toujours pour son inconduite notoire au sahel, son double jeu, même si je sais qu’elle n’a encore dit son dernier. Mais c’est peine perdue. Elle a préféré faire la sourde oreille  aux réclamations légitimes des peuples noirs d’Afrique, en jouant à l’hypocrisie. Mais chaque chose à une fin. La fin de l’influence sans partage de la France sur l’Afrique s’achemine à sa fin. Elle ne peut s’en prendre qu’à elle-même.

3- La contestation s’est poursuivie au Kenya le jeudi nonobstant le retrait  du projet de budget annoncé le mercredi 26 juin 2024 par le Président kenyan William Ruto. Quel commentaire faites-vous de cette attitude de la jeunesse kenyane ?

L’actualité au Kenya est dominée par des manifestations pour le retrait d’un projet de budget annoncé le mercredi 26 juin 2024 par le Président kenyan. Elles ont éclaté le mardi 25 juin 2024, et ont fait plusieurs victimes, dont des blessés et morts. Selon des ONG comme HRW, il aurait eu au moins 30 morts. Quant à la KNHRC (Kenya National Human Rights Commission), l’organe officiel de défense des droits humains, le nombre de blessés s’élevé à près de 300 personnes. L’usage de la force par la police lors de ces manifestations a fait l’objet de nombreuses condamnations cette semaine. Finalement,  le mercredi suivant cette journée sombre, le président kényan William Ruto a cédé aux exigences des jeunes manifestants et a retiré l’impopulaire projet de budget qui prévoyait de nombreuses taxes. Si de précédentes journées de mobilisation demandant le retrait de ces nouvelles taxes se sont déroulées dans le calme, la manifestation de mardi aux abords du complexe abritant l’Assemblée nationale et le Sénat, dont certains bâtiments ont été incendiés et saccagés, a tourné au bain de sang. En dépit du retrait dudit projet, le jeudi, quelques centaines de personnes se sont réunies dans la capitale kényane Nairobi pour une nouvelle manifestation.

Pour rappel,  ce mouvement de contestation inédit mené par la jeunesse, qui a gagné tout le pays en moins de deux semaines, a émergé peu après la présentation au Parlement le 13 juin du budget 2024-2025, prévoyant notamment une TVA de 16% sur le pain et une taxe annuelle de 2,5% sur les véhicules particuliers.

Mais ces manifestations de colère de la jeunesse est un avertissement au gouvernement, que plus jamais rien ne sera plus comme avant. Ces jeunes manifestants, communément appelés « Génération Z », ne sont pas prêts à se laisser faire. Ils ne veulent pas que leur mécontentement s’arrête sur des simples promesses. Ils veulent qu’ils soient écoutés lors des prises de décision leur concernant.

 

Rédaction de Farafinainfo.com

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