GEL DE L’AIDE AMÉRICAINE : l’Afrique doit-elle continuer avec ce « modèle de développement prêt-à-porter » ?
Le gel brutal du financement des programmes d’aide à travers le monde par le département d’Etat américain pour 90 jours pourrait avoir des conséquences dramatiques dans plusieurs pays, notamment les pays du berceau de l’humanité qui dépendent exclusivement de l’aide extérieure. Des cris plaintifs des milliers de personnes commencent déjà à se faire sentir notamment au niveau des organisations africaines financées par cette aide du Pays de l’Oncle Sam.
En effet, ce gel brutal de l’aide américaine par le Président Donald Trump relance le débat sur la question de l’aide extérieure et met surtout en exergue l’urgence aujourd’hui, pour les Etats africains, de revoir leurs stratégies de développement. Ils doivent se réinventer, se défaire du complexe d’infériorité et adapter leurs modèles de développement à leurs réalités. En d’autres mots, ils doivent avoir confiance en eux-mêmes et doivent s’engager dans de franches relations de coopération et de partenariat gagnant-gagnant d’avec l’Occident et les autres mondes.
Le monde grandit, mais l’Afrique reste la même ; elle ne grandit pas avec le monde comme l’a dit un jour le milliardaire américain Bill Gates. Disons-nous la vérité ! Calqué sur le modèle occidental, le développement n’a pas fait avancer le continent noir jusqu’à présent, car la culture, les traditions en un mot, n’ont pas été prises en compte dans les différents modèles de progrès économiques et techniques proposés. Au lieu d’adapter par exemple la démocratie occidentale aux réalités africaines, l’Africain, par complaisance et par mépris pour ses propres valeurs, trouve mieux de plier nos valeurs à celles occidentales ; alors que les deux réalités sont diamétralement opposées. On copie parfois des lois qui sont en déphasage total avec nos réalités et valeurs sociétales.
La pire des maladies inoculées à l’Afrique par la colonisation est ce fâcheux complexe d’infériorité qui continue de ronger et malheureusement de consumer nos valeurs jusqu’à leur essence. Cette volonté manifeste de se renier, de refuser d’être ce qu’on est tout en rêvant qu’on peut être autre que ce qu’on est, est ce virus maudit, ne respectant rien du tout, qui a été inoculé à l’Africain et qui ne cesse de le rendre ridicule aux yeux des autres, de l’enfoncer dans ce tunnel obscur dont le terminus n’est autre que la désolation, le remords et la dépravation.
Il est évident que l’énigme à laquelle le continent est confronté est sans doute ce complexe d’infériorité dont il est victime. L’Africain, formaté depuis le temps colonial, a toujours en tête qu’il n’y a de meilleures cultures, de valeurs à magnifier que celles transportées de l’Occident ou de l’Arabie, tout en oubliant que le souci majeur de ces deux mondes est de maintenir les pays africains dans les conditions de servitude et de dépendance.
Cette bruyante décision de gel brutal de l’aide américaine est un signal fort et instructeur que le président américain vient d’envoyer au reste du monde, notamment le continent africain dont les dirigeants doivent savoir désormais que ce n’est aucunement en faisant les lèche-bottes auprès des Occidents et autres puissances qu’ils sortiront leur continent du marasme économique dans lequel la quasi-totalité des pays africains végète depuis leur « indépendance ». Après plus d’un demi-siècle, l’Afrique n’a presque rien fait de son « indépendances ».
La colonisation a certes pris fin, mais les esprits sont restés enchainés, prisonniers de l’idée d’infériorité. Et la pire des prisons de ce monde est celle qui est dans la tête. Il faut une véritable volonté politique aujourd’hui pour sortir l’Afrique de l’ornière. En clair, c’est un leurre de continuer à compter sur des aides qui n’aident pas du tout le continent.
Les cultures et les traditions doivent, pour un développement harmonieux, hardi, fécond et prompt, reprendre les places qui sont les leur dans le développement de nos pays. Nous devons, en quelque sorte, prendre les principes universels des modèles de développement occidental puis les adapter à nos réalités. Le développement social et culturel s’obtient à travers la conservation des éléments traditionnels comme les folklores au niveau de la musique, des sites touristiques traditionnels, car chaque Nation, chaque Peuple s’identifient à travers eux et c’est dans ces valeurs qu’il peut mieux s’épanouir.
Le fin mot de l’histoire est que nous souffrons de notre croyance à tout ce que l’Occident nous propose ou nous dit ; on avale cela sans même chercher à comprendre si c’est bénéfique pour nous ou pas. Une modernité à l’africaine, qui tient compte de nos valeurs sociétales, serait mieux. La civilisation est le levier de l’épanouissement et de l’organisation d’un pays. En d’autres termes, se connaitre soi-même est le point de départ de l’émergence du continent dans le vrai sens de l’expression.
Sayon MARA, Juriste
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