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Guinée : 63 ans après l’indépendance, l’Interview de Hafidjouh Baldé !

Dossier – Célébration de l’indépendance de la Guinée – Il est polyglotte et globe-trotter. Il a fait de très nombreux voyages d’études pour apprendre et comprendre la culture arabo-musulmane, mais pas que. Il est juriste publiciste et entrepreneur. Il, c’est bien sûr Hafidjouh Baldé. Rencontre avec ce Guinéen qui «est persuadé que l’espoir est permis», même si «les «premiers pas du Colonel (Mamadi) Doumbouya sonnent comme du déjà entendu» juste après la prise du pouvoir par le CNDD (Conseil National pour la Démocratie et le Développement) du Capitaine Moussa Dadis Camara…

L’interview réalisée par Camara Mamady

Qui est vraiment Hafiz Baldé ?

Hafidjouh  Baldé est un citoyen guinéen diplômé en Droit de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry. Il a vécu pendant des années au Maghreb et en Mauritanie pour apprendre la culture Arabo-musulmane. Il rentre en Guinée en 2007, travaille pendant des années dans une société de téléphonie mobile. En 2016, il créé sa propre société de Conseil en Investissements et Stratégies de Développement nommée Afikia Services qu’il gère toujours.

Quel regard portez-vous sur les journées de Concertation Nationale lancées par le CNRD (Comité National du Rassemblement pour le Développement) pour une Transition inclusive et apaisée ?

Les concertations engagées, par le Colonel Mamadi Doumbouya, Président du CNRD et Président de la République de Guinée, sont un tremplin pour réunir les Guinéens autour d’un espoir qui est en voie de devenir un projet de refondation de la République autour de certaines valeurs comme la réconciliation des Guinéens, la confiance entre les Guinéens et leurs dirigeants, l’égalité de chance des citoyens devant la loi et les services de l’Etat…… Bref, la tenue de ces concertations indique que le CNRD se sent avant tout concerné par les préoccupations majeures du peuple de Guinée en entier.

Les premiers pas du Colonel Mamadi Doumbouya, Président du CNRD, Président de la Transition sont-ils rassurants ou sonnent-ils comme du déjà entendu ?

Les premiers pas du Colonel Doumbouya sonnent, avant tout, comme du déjà vu et entendu. Au vu de ce qui s’est passé sous le magistère du CNDD (Conseil National pour la Démocratie et le Développement) du Capitaine Dadis Camara. Mais son attitude et sa démarche sont plutôt rassurantes. Pour le moment, je suis persuadé que l’espoir est permis.

Avez-vous un message pour ce tombeur du Pr. Alpha Condé ?

Mon message pour le Colonel Doumbouya est le suivant : de tenir sa promesse et de ne pas décevoir le Peuple de Guinée; de bien mener la transition «au bon port»; de s’assurer que l’ancien Président et les barons de l’ancien régime soient traduits en justice en Guinée ici et non ailleurs; de faire en sorte que le fichier électoral et le code électoral soient entièrement revus ou refaits. Qu’une nouvelle loi fondamentale soit écrite et soumise au référendum, que le processus électoral commence par les communales et se termine par les présidentielles pour éviter qu’un président élu ne fasse du forcing pour s’octroyer une majorité au sein de l’Assemblée Nationale ou des communes.

Quelle lecture faites –vous du coup d’Etat contre le Pr. Alpha Condé, 1er Président démocratiquement élu de la République de Guinée ?

La lecture que je fais du coup d’Etat contre Mr Alpha Condé est que ce dernier mérite ce qui lui arrive. Avec le troisième mandat, il a renié tout ce pourquoi il a prétendu se battre durant toute sa vie : la démocratie et l’alternance au pouvoir. Sa gestion du pouvoir a été une catastrophe pour les Guinéens et une calamité pour les générations futures qui, si nous ne rectifions pas les choses, vivront eux aussi dans la haine et l’ethnocentrisme. Donc ce coup d’Etat est un véritable salut pour le peuple de Guinée.

Joyeux et bel anniversaire à la République de Guinée, qui fête le 63ème anniversaire de son accession à l’indépendance. Avez-vous un souhait à formuler voire un vœu pieux à faire pour les prochaines années ?

Joyeux anniversaire de fête de l’indépendance à tous mes compatriotes. Je souhaite que la prochaine transition soit une réussite, que les années à venir nous permettent enfin, de vivre dans la paix, dans la fraternité et dans la cohésion sociale.

Que retenez-vous de ces années de souveraineté nationale et internationale en tant que citoyen guinéen ?

J’ai comme impression que toutes ces années de souveraineté nationale n’ont pas été mises à profit pleinement pour nous permettre de développer notre pays. Il y’a eu énormément de gâchis. Maintenant, il faut absolument chercher à aller de l’avant en corrigeant les erreurs du passé.

63 ans après l’indépendance : quel héritage des Présidents Ahmed Sékou Touré, Lansana Conté et Alpha Condé ainsi que les Chefs d’Etat Moussa Dadis Camara et Sékouba Konaté ?

C’est difficile de décrire sommairement l’héritage que nous nous ont légué les anciens Présidents de notre pays. Mais, succinctement, je dirai que le Président Sékou Touré nous a rendus indépendants et fiers avant d’établir une dictature révolutionnaire sanglante. Le Président conté nous a fait rentrer dans l’ère de la démocratie, du multipartisme, mais aussi du libéralisme sauvage et mal géré. Le Président Dadis Cama a d’abord suscité un énorme espoir avant de revenir sur sa promesse et de plonger la Guinée dans une situation de troubles et d’incertitude. Le Général Konaté restera celui qui a géré la transition de son époque comme du business du far west américain. A mon avis, il est le responsable de la pire magouille électorale qui a engendré les problèmes que nous gérons aujourd’hui.

Quelle question aimeriez-vous répondre que nous n’avons pas posée ?

Le sujet, que j’aimerai aborder ici et qui ne m’a pas été demandé, est avant tout celui du modèle politique nouveau qu’il nous faut. Les partis politiques actuels étant tous de tendance et de base ethniques, je proposerai volontiers de les dissoudre et d’en créer d’autres sur la base de différentes tendances : libérales, sociale-démocrates, écologiques ….., et que chaque parti soit jugé sur sa capacité à réunir des Guinéens de toutes les régions naturelles en son sein et pas seulement sur une simple coloration ethnique du Bureau national. J’aimerais aussi que la future constitution ouvre la voie au droit de candidatures indépendantes, celles des leaders d’opinion et celles des membres de la société civile…. aux élections présidentielles. J’aimerais également que les collectivités décentralisées soient étendues au niveau administratif régional afin de permettre une prise en compte réelle des préoccupations spécifiques des régions naturelles. J’aimerais enfin que ce soient des commissions chargées respectivement de l’élaboration de la loi fondamentale, de la rédaction du code électoral, de la reprise totale du fichier électoral…qui indiquent chacune en ce qui la concerne ,  le temps ou la période nécessaire qu’il faudra pour lui permettre de bien faire son travail et de rendre sa conclusion. Ainsi il sera judicieux de déterminer à partir de ces différentes périodes proposées, une période de transition nationale adéquate. A mon avis, il ne sert à rien de préciser à l’avance une période courte, de bâcler le travail et de foutre en l’air cette énorme opportunité qui nous est offerte actuellement par le CNRD. Merci bien.

Camara Mamady