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Reporter, témoin des faits

Lettre d’Algérie : Noir d’ici, noir de là-bas…

Par Chahredine Berriah

L’assassinat abject de George Floyd par un policier blanc, le 25 mai 2020 à Minneapolis aux USA, m’a appris, à mon corps défendant, qu’en réalité, ici en Afrique, on n’est pas aussi noir qu’on le pense.

Il faut me croire : Mamadou, pour ne citer que lui, est Nigérien, d’un village près de Niamey. Il a été découvert inerte, il y a moins d’une année, au fond d’une tranchée entre l’Algérie et le Maroc. Son corps portait des ecchymoses. En l’absence d’une autopsie, j’en conclus à une mort suspecte. Il a été inhumé anonymement, sans épitaphe sans que sa famille n’eût été informée.

Hormis quelques uns de ses concitoyens, migrants en situation irrégulière, et une association de Maghnia (ouest algérien) qui l’ont pleuré silencieusement -parce qu’ils auraient attiré l’attention des autorités locales sur un noir qui aurait du mourir ailleurs – aucune organisation des droits de l’homme n’a crié au scandale ou dénoncé un acte raciste. Mamadou  était nigérien, pas assez noir pour mériter une manifestation de colère ne  serait- ce que dans son propre continent.

Pourtant, de son vivant, on l’appelait kahlouch (noir). Mort, on lui a dénié cette « identité ». Peut-être que pour nous, Africains… du nord, plus blancs que les blancs, Mamadou était mauvais de son vivant… et n’est rien, une fois dans sa tombe.

George était Kahlouch, aussi et Africain… d’origine, mais Américain. Camara était Africain d’origine, aussi mais…  Nigérien seulement.

Camara était un noir d’ici et George, noir de là bas. C’est toute la différence !

C.B