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L’échec du dialogue national inclusif, à travers lequel les acteurs nationaux de l’opposition et du pouvoir entendaient trouver des solutions consensuelles aux grands problèmes nationaux (système électoral, dossiers en suspens liés à l’unité nationale et à la cohésion sociale, gouvernance économique…), avait ramené une atmosphère de crispation et de méfiance entre les différents acteurs politiques.
L’opposition démocratique, attachée à la stabilité du pays et à la concertation visant à régler les grands problèmes qui entravent son progrès, avait accepté de répondre à l’invitation du Ministère de l’Intérieur et de la Décentration pour débattre de la question de préparation des élections prévues en 2023. Des échanges difficiles et laborieux finirent par aboutir à un accord politique entre le Gouvernement et les Partis politiques, et une Commission tripartite de suivi (Ministère de l’Intérieur, Partis politiques et CENI) fut instituée. Mais le passage à l’application des clauses de l’accord, en particulier celles relevant de la CENI, fut chaotique et décevant, du fait d’une mise en œuvre unilatérale malgré les mises en garde répétées de l’Opposition démocratique. Une date inadaptée fut imposée pour des scrutins techniquement complexes ; l’improvisation et le travail bâclé marquèrent la gestion des opérations et toutes les portes furent ouvertes à un désordre généralisé : le recensement, les bureaux de vote, les dépouillements et la transmission des résultats donnèrent lieu à une fraude massive, y compris informatique. La corruption, le trafic d’influence et les intimidations ont eu libre court, transformant les élections en un vaste marché d’achat de consciences et de tractations où ne comptent désormais que les puissances de l’argent, administratives ou tribales.
Une telle conduite du processus électoral ne pouvait, en aucun cas, permettre d’atteindre l’objectif fixé, celui d’avoir un scrutin transparent, crédible dont les résultats seraient acceptables par tous. Le gâchis est énorme et la déception de l’opinion publique est grande, car le pays inaugure une nouvelle crise électorale qui survient dans un contexte de crises sociale et sécuritaire profondes comme en témoignent les derniers évènements douloureux, marqués par la mort d’Oumar Diop, à la suite de son arrestation au commissariat 1 de Sebkha et de Mohamed Lemine Samba, lors d’une manifestation à Boghé. Le décès de ces deux jeunes citoyens, qui rappelle celui de Soufi Ould Chein, fut suivi d’une vague d’indignation aux conséquences imprévisibles, à Nouakchott et dans d’autres villes de l’intérieur du pays. Ces développements dramatiques révèlent, encore une fois, le danger de la répression et la gravité du ras-le-bol au niveau des jeunes, frappés par le chômage et la précarité endémiques.
Nous, partis signataires de la présente déclaration :
- présentons nos condoléances les plus attristée aux familles des victimes et exigeons une enquête rapide et juste sur les circonstances de leur mort ;
- réclamons la prise de sanctions contre les responsables sécuritaires concernés par la répétition de cas similaires et d’infliger les plus lourdes peines aux auteurs des meurtres en cause et de pratiques de torture, et à affronter le défi de l’insécurité ambiante, avant qu’il ne soit trop tard ;
- condamnons toute forme de violence, qu’elle provienne des services de sécurité ou des manifestants, ainsi que toute dérive qui transforme les manifestations pacifiques en actes d’intimidation des citoyens ou de vandalisme sur les biens publics et privés, et appelons à la vigilance contre tout acte ou parole qui peut constituer une atteinte à l’unité nationale et la paix civile ;
- appelons les autorités publiques à prendre la mesure de la gravité des crises dans notre pays, entouré d’un environnement sahélo-saharien trouble, et à s’orienter vers une politique d’entente nationale pour conjurer les dangers qui nous guettent ;
- réaffirmons notre demande de reprise de l’ensemble du processus électoral de façon consensuelle pour ramener la confiance entre les acteurs politiques, gage d’une normalisation du fonctionnement de nos institutions ;
- exhortons le Gouvernement à trouver, dans le cadre de la Commission de suivi de l’accord politique, une solution de sortie de la crise électorale qui risque d’évoluer vers une crise politique, laquelle solution devrait prendre en considération les revendications exprimées, en grande majorité, par les partis politiques (opposition et majorité) ;
- réclamons la dissolution de la Commission électorale et la réforme du système électoral dans son ensemble sur des bases acceptables pour tous.
Nouakchott, le 12 Dhou Al Quida 1444 – 02 Juin 2023
Les partis signataires :
- Alliance Populaire Progressiste (APP)
- Front Républicain pour l’Unité et la Démocratie (FRUD)
- Parti SAWAB
- Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD)
- Rassemblement National pour la Réforme et le Développement (TAWASSOUL)
- Union des Forces du Progrès (UFP)