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Reporter, témoin des faits

–Quand tu ne seras plus là… –2– (Mohamed Sneiba)

«QUAND TU NE SERAS PLUS LÀ»  – Un titre plus qu’évocateur du livre du doyen Mohamed Sneiba, un Journaliste pas comme les autres. Cette grande signature de la presse africaine a su se projeter dans le temps pour prédire sous sa plume éclairée la future vie d’un Président après la fonction présidentielle. Et les faits de l’actualité sont en train de lui donner raison…

La Rédaction de Farafinainfo.com partage le plaisir de lire ce livre avec ses lecteurs …

Quand tu ne seras plus là…

2. Tu as encore le temps de dire « oui » à ceux qui répètent, comme des enfants de chœur, le célèbre refrain de la chanson de Garmi, « Aziiz, laa temchi anna » (Aziz, ne nous quitte pas). Eh oui, parce que, franchement, on ne peut te refuser ce que la communauté internationale a accepté tacitement pour d’autres « présidents fondateurs ». Un « poète » conquis par la politique a même profité du festival de Walata pour rappeler qu’en Algérie, Bouteflika, cloué à son fauteuil roulant depuis plusieurs années, se représente pour la cinquième fois ! A 84 ans, Paul Biya est à son septième exercice. Kagamé pourrait rester jusqu’en 2029 ! En Egypte, Al-Sissi fait dire au parlement de son pays « si, si, jusqu’en 2034 ! Et la liste est longue. Alors, pourquoi pas toi, fichtre ?

Oui, tes partisans ont raison de refuser que tu sois le « petit mur » de l’Afrique, toi un ancien général qui a su forcer le destin. Deux coups d’Etat au compteur, ce n’est pas rien ! C’est même une première dans le pays !

Moustapha Salek a poussé Daddah dehors, Louly a pris la place de Bousseif mais, au bout de quelques mois, Haidalla, l’a poussé « doucement », vers la sortie. Ensuite, Taya a profité d’une circonstance favorable, pour occuper le palais. Et ça a duré vingt ans ! Je ne te dis rien sur cette période parce que tu étais là, observant, apprenant et attendant ton heure qui a sonné un certain 03 août 2005. Ton coup du berger était imparable. Il était la réplique parfaite de celui joué par Taya à Haidalla. Ne dit-on pas que : « qui tue par l’épée, périra pas l’épée » ? Mais, heureusement que, lors de ton coup contre Maawiya, tout comme celui que tu mèneras trois ans plus tard contre Sidioca, aucune goutte de sang n’a coulé !

L’argument de tes partisans, pour justifier le troisième mandat ? Sa solidité tient à sa simplicité : Ce qui est permis pour certains présidents de Républiques bananières, doit l’être également pour les autres. Quand l’Occident ne dit rien, c’est qu’on n’est vraiment pas tombé dans la « ridda » (le sacrilège). Paris, Washington et Londres protesteront certes durant quelques jours ou semaines, le temps de donner l’impression qu’ils sont pour le respect de la démocratie, mais ils n’entreprendront rien, absolument rien, tant que leurs intérêts ne sont pas menacés.

Mais toi, tu sais par expérience que l’appel au troisième mandat est un leurre, une perfidie même. Les Mauritaniens soutiennent toujours un pouvoir, jamais un homme. Celui qui te succédera aura droit aux mêmes égards. Il sera applaudi et chanté, jusqu’au jour où il décidera de partir, s’il n’est poussé vers la sortie par un énième putsch.

Tu sais que tout est mensonge. Les initiatives et le reste. Tu n’as pas été aux côtés de Taya pour rien. Le Système n’a plus de secrets pour toi.

Qu’on t’aime ou pas, il y a une chose qu’il faut reconnaître : ta capacité à manœuvrer. On dit que tu n’as pas été sur le terrain de la guerre mais la politique est un champ de bataille tout aussi pernicieux. Les gens agissent sans honneur. L’important est de gagner. De tirer profit des situations favorables. C’est ce que tu fais depuis 2005. Dans le cockpit, avec Ely, ton cousin disparu mystérieusement en mai 2017, tu tenais parfaitement ton rôle de copilote. Jusqu’à l’achèvement de la transition militaire, en 2007, tu n’as rien laissé apparaître de tes intentions. Personne ne pouvait deviner, à l’époque, que tu allais être président à la place du président.

Avec Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, « le président qui rassure », la situation avait complètement changé. Le pilotage était devenu automatique. Le bon marabout tenait seulement le manche mais c’est toi qui avais fixé le cap. Tu savais que, dans deux ans au plus, tu serais arrivé à tes fins. Occuper la présidence de laquelle tu avais dégagé Taya, l’homme que tu as servi vingt ans durant ! Bravo général ! Pardon, bravo Monsieur le Président !

Mohamed Sneiba – Journaliste – Écrivain et  Blogueur