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Reporter, témoin des faits

Tribune : Quelle transition pour aboutir à la République de Guinée tant réclamée ?

L’analyse des systèmes politiques ayant verni l’évolution de tous les peuples et organisations est une source d’inspiration pour tout groupe de décideurs avertis.

L’unanimité en Guinée devrait s’exprimer pour une transition transformationnelle conséquente de notre Etat et non pour une transition imbibée de flagornerie qui frise le mythe de Sisyphe.

La bataille pour l’avantage collectif est plus citoyenne, responsable et progressive.

Les récentes actions montrent encore à suffisance nos lacunes, notre volonté manifeste de refus d’être dans la dynamique d’une rupture plus ou moins soft et/ou brute avec les tares de notre société, une servitude volontaire à la médiocrité, à un cafouillage institutionnel où quelques individus en tirent grand profit au détriment de la masse.

Le discours du 5 septembre 2021 dénonça toutes ces manœuvres éhontées, les pratiques non orthodoxes du fonctionnement de l’administration publique, le fonctionnement biaisé de la justice, la dilapidation des fonds publics, le culte de la personnalité, la restriction des libertés, le déni du droit…hélas, nous sommes au regret de constater la réanimation de ces différents maux dénoncés avec véhémence.

En dépit de quelques points positifs observés, la démarche affichée par les autorités, dilue drastiquement ces points à l’actif du Président de la transition.

Et le bon sens nous amène aux interrogations suivantes :

Notre élite n’est-elle pas un réel handicap pour notre avancée, pour la construction de notre société républicaine ?

Toutes ces grandes études servent à quoi ?

Quelle République voulons-nous ?

L’amnésie est-elle voulue ou provoquée dans notre société ?

Pourquoi toujours déplacer nos problèmes de société ?

Si ce n’est pour favoriser l’émergence d’une classe de dirigeants dont le profil n’est pas compatible à diriger un pays, il est une évidence que le management public à un haut niveau ne s’improvise point, il va de pair avec une exigence de communication, d’intelligence, de finesse, d’expériences et de parcours.

Dans le cas précis de notre pays, la course à la promotion, aux avantages financiers de circonstance, sont devenus un sport de prédilection ; ce qui est synonyme d’une indélicatesse intellectuelle.

Nous sommes tous partisans de la réussite de la transition politique guinéenne, une réussite axée sur les fondamentaux de bonne gouvernance, de choix stratégiques et réalistes, de conception de design institutionnel qui prend en compte nos réalités sociologiques et nos aspirations profondes afin de vivre un fonctionnement normatif de notre République.

A ce titre, il est à rappeler que la République n’est pas qu’un mode d’organisation politique ; elle est aussi un principe qui doit devenir la clé de l’organisation sociale et le ciment des valeurs nationales.

Le fait aussi que l’on se bombe le torse en exclamant notre souveraineté face aux organisations internationales, régionales voire même à la tribune des Nations Unies, frise la dérision.

Il est une évidence que les éléments sur lesquels, la souveraineté s’exprime voire s’affiche ne sont pas des données théoriques mais plutôt quantifiables, qualifiables tels : l’éducation, la sécurité, la justice, le système de santé, le tissus industriel, la recherche technologique, la puissance économique et militaire, la production agropastorale….

Pour Jean BODIN, dans « les six livres de la République » (1576) : « La souveraineté est la puissance absolue et perpétuelle d’une République ».

Il est alors temps que les souscrits à la pitance du régime « CNRD » arrêtent d’inonder l’espace public de commentaires subterfuges et démagogiques à tout va.

Les propos pompeux, va – t’en guerre, populistes ne relèvent point à priori de l’intelligence et du pragmatisme.

Rappelons que nous sommes en 2024, le monde a évolué, les aspirations de la population ont pris une nouvelle envergure, la prédominance des canaux d’informations est d’actualité, le poids démographique, le design institutionnel qu’il faut à notre pays est un impératif, le découpage administratif hérité répond -il à l’évolution de notre société, l’utilisation de l’ethnie à des fins politiques, le système éducatif, la santé, l’environnement, la structure agropastorale,… sont autant de sujets sur lesquels, les réflexions des autorités du CNRD et surtout du Président Mamadi DOUMBOUYA devraient porter.

Quand on décide de procéder à une rectification institutionnelle comme le clame très souvent le Président de la Transition, une dynamique à plusieurs implications complexes voire sinueuses éclos ; devant un tel fait, le Général Président ne doit pas être hésitant et avoir non plus la main moite, l’instinct de stratège militaire doit prévaloir.

L’usage des instruments juridiques adéquat devrait encadrer tous les pans de notre société, ceci crée un climat de confiance et de sérénité. A contrario, c’est le déni de nos valeurs sociétales.

Ce semblant institutionnel mis au point biaise toute initiative de changements, de réformes.

Nous vivons un régime d’exception, la gouvernance aussi doit être d’exception dans un élan élitiste, vertueux et de compétences avérées.

Nous devrions partir de cette exceptionnalité pour entamer un nouveau départ avec assez de garanties pour consolider les réformes institutionnelles en cours et futures.

Nos réalités dans leur ensemble doivent définir notre système politique, ceci est une évidence.

Les USA, la Suisse, l’Israël, la Corée du Sud, le Botswana, le Singapour en sont une parfaite illustration.

Très malheureusement, l’élite africaine, est un adepte du mimétisme et gobe tout ce que l’occident offre comme alternative politique et économique voire sociale.

Les cas de réussite à l’aune de DENG en Chine exigent plus de fermeté, un caractère fort, un mental en acier, une grande culture politique pour mener à bon port le navire Guinée.

Et non un barguignage sombre juxtaposé sur un tintamarre médiatique de l’ère soviétique, le tout enveloppé par un affichage du Président accompagné d’ovni slogans. Un leader ivoirien, il y a quelques mois sur un plateau de TV disait ceci : « ce sont les arbres qui tombent qui font du bruit sinon, la forêt pousse dans le silence ».

Le problème en Guinée en particulier et en Afrique en général, ce n’est pas une question de démocratie ou un autre système politique ou d’organisation de nos États ; tout simplement, c’est une question de déficit de LEADERSHIP TRANSFORMATIONNEL conséquent, d’un manque de vision et de bon sens, de légèreté affichée dans l’établissement de nos institutions, une volonté manifeste de ne pas respecter nos propres textes adoptés.

Le CNRD aurait dû organiser une concertation beaucoup plus orientée stratégie, vision, réflexion, design institutionnel, la conduite de la transition, son contenu, la mise au point d’un mécanisme de veille et d’alerte et non fabriquer un cercle de lamentations qui met de côté les vrais maux de notre pays.

Au terme de cette concertation d’un niveau relevé, des propositions documentées avec à la clé un observatoire national de la transition qui définira de manière explicite la finalité de la transition en cours.

Dommage que l’attention soit beaucoup plus prononcée sur la tenue des élections, le mimétisme politique, les décisions exogènes à nos réalités sociologiques et non sur le contenu de la transition, la marche de la République, la promotion de l’effort collectif pour une cohésion constructive, des valeurs républicaines, le mécanisme structuré des institutions qui permettra que « les armes cèdent à la toge ».

Dans la construction véritable d’une République, le discours sur la volonté de bien faire ne suffit plus, cette volonté s’appuie sur des compétences, des valeurs, des outils afin de déployer un véritable travail pour impulser notre rayonnement et définir un horizon beaucoup plus fin, précis

Notons que les improvisations ne doivent pas figurer comme un élément dans la matrice de travail et interdisons-nous de conspirer à écrire l’histoire de ce pays avec la gomme.

Doussou Mohamed KEITA

Economiste/Manager stratégique

Courriel : mohdkeita@gmail.com

 

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