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Reporter, témoin des faits

Voyage d’Inal : L’Enfer revisité

Publié le par Camara Mamady

28 novembre 1990 :28 militaires négro-mauritaniens, ont été menés vers la potence. Pendus haut et court par leurs frères d’arme à Inal, une bourgade sise à 6km de la frontière mauritano-marocaine et à plus de 400km de Nouakchott. Le hameau, également théâtre de la tuerie de 509 autres négros mauritaniens, est devenu un lieu de prière et de recueillement. Veuves, orphelins, parents des victimes ainsi que rescapés, leaders politiques militants de droits humains, ont pris pour habitude de s’y rendre, pour rendre hommage, prier et réclamer justice. Le 28 novembre dernier, n’a pas été en reste. Reportage.

Il y avait une vive émotion sur l’esplanade de la Case, le mardi 27 novembre dernier. La souffrance se lisait sur les visages des veuves, orphelins et autres parents de toutes les victimes des différentes exécutions extrajudiciaires ainsi que les militants défenseurs des droits humains, les représentants des formations politiques et les rescapés de ces terribles. Après des heures passées à tourner en rond, les uns et les autres, ont finalement décidés d’embarqués à bord des véhicules pour rallier Inal. Le voyage fut un véritable parcours du combattant. Les difficultés ont commencé à la sortie de Nouakchott ou un policier zélé qui avait décidé d’être plus présidentialiste que le président a bloqué les véhicules, pour une histoire de bond de sortie. Exacerbés par cette situation, les jeunes gens particulièrement ceux du Mouvement TPMN (Touche pas à ma nationalité) ne se sont pas fait prier pour bloquer à leur tour toute la voix publique. Pris dans son propre jeu, le policier essaya d’apaiser la situation en demandant aux jeunes militants contestataires d’arrêter de brûler les pneus au beau milieu de la voie publique de s’embarquer dans les voitures pour poursuivre leur voyage. La caravane de 24 voitures continua sans problème jusqu’à Inal ou les attendaient des gendarmes et des gardes en armes.

La justice d’abord après le pardon

L’accès à Inal était tout simplement interdit aux visiteurs qui n’ont eu d’autre choix que de s’installer l’entrée du village. Assis ainsi dans ce désert et perdu dans ses pensés, le jeune Mamadou Lam Toro Camara, fils du Sergent-chef Lam Toro Camara pendu le 28 novembre 1990, a du mal à retenir ses larmes. A quelques pas de lui, se trouve Aïssata Niang qui est venue des Etats-Unis d’Amérique. Elle aussi a perdu son époux et père de ses quatre enfants : Welé Ousmane. Si l’on en croit les dires de cette veuve, son mari maître principal Welé Ousmane, matricule 78080, né en 1958 à Djeol, a été arrêté le 27 novembre 1990 dans son service à la marine nationale et tué le 5 décembre 1990. Elle vit actuellement avec ses enfants aux USA depuis douze ans. Il y avait aussi d’autres orphelins. Et chacun a raconté les atrocités qu’ont subies leurs conjoints, fils et frères. Ils elles demandent que justice soit faite.

La mort n’a vraiment pas voulu d’eux

Ibrahima Dia, Oumar Bâ et Mamadou Sy, l’auteur de «L’enfer de l’Inal» font partie des rares personnes chanceuses, qui ont échappé de justesse à «L’enfer d’Inal». Le roman autobiographique retrace le parcours singulier de Mamoudou Sy entre les mains de ses frères d’armes. Dans son allocution à Inal, il a laissé entendre : «Ce jour (28 novembre 2012) où notre armée parade fièrement dans toutes nos villes, ce jour de liesse populaire, nous voici donc réunis ici loin de toutes ces réjouissances, tels des proscrits ou des bannis. Et pourtant nous ne sommes ni l’un ni l’autre. Nous sommes des citoyens mauritaniens pleinement, entièrement. Nous sommes des citoyens comme tous ceux, qui partout dans le pays, célèbrent la fête, la fête de l’indépendance nationale. Mais aujourd’hui, cette fête n’est pas la nôtre». Sur la même lancée, Dia Ibrahima Demba a raconté sa mésaventure entre les mains de ses frères de l’armée mauritanienne.

Les ONG exigent que la justice soit faite

Dans une allocution faite au Rénovateur Quotidien, Alassane Dia, Coordinateur du Mouvement TPMN a dit que la date du 28 novembre est souillée pour ce qui s’est passé la nuit du 27 au 28 novembre 1990. Il accuse l’Etat mauritanien d’être le seul et unique responsable de cette situation. Et exige que justice soit faite. Tout comme d’ailleurs, les autres ONG IRA, SOS-Esclaves, AFMAF qui exigent également la vérité et la justice.

Camara Mamady

Le Rénovateur Quotidien