Covid-19 et incendies. Depuis l’été dernier –un été chaud- l’Algérie a souffert et continue de souffrir du virus et des conséquences des incendies qui ont affecté le pays, particulièrement la Kabylie ( centre algérien).
Par Chahreddine Berrriah pour Farafinainfo.com
De violents incendies ont causé des désastres matériels et écologiques dont le ravage de plus de 25 000 hectares de massifs forestiers. Selon les chiffres officiels rapportés par l’agence de presse Algérie Presse service, « les feux ont détruit plus de 8000 ha d’oliviers, soit plus de 113.000 arbres à travers les 51 communes où les incendies ont été dénombrés, ainsi que 800 autres ha de divers arbres fruitiers. En outre, sur les 100.880 sujets d’élevage, le même bilan provisoire fait état de plus de 200 têtes de bovins, 300 têtes d’ovins, 380 caprins et 100.000 sujets avicoles ».
En Kabylie, la récolte d’olives a été réduite à deux semaines au lieu de deux mois. La pénurie, qui se fait ressentir dans les huileries, est due à de multiples facteurs parmi lesquels des phénomènes climatiques comme la sécheresse et les incendies mais également la prolifération d’insectes ayant ravagé les cultures.
« En plus de villageois brûlés, des morts, beaucoup d’autochtones sont atteints de Corona, c’est donc autant de main d’œuvre en moins. Nous avons perdu beaucoup d’arbres fruitiers et celles qui restent sont abandonnés, car pratiquement les hommes et les femmes manquent pour s’en occuper » avouait Mohand Mouhoub, impuissant et en pleurs, membre de comité de village.
Cependant, bien que des sources officielles indiquent qu’un crime organisé est à l’origine du déclenchement des incendies, la sécheresse due au changement climatique, est pour beaucoup dans leur propagation rapide.
Il faut noter que l’Algérie vit une grave crise d’eau provoquée par une faible pluviométrie, ces dernières années. Cette situation a été fortement ressentie en 2021.
Le Professeur Abdelkrim Chelghoum, directeur de recherche à l’Université des sciences et de la technologie Houari-Boumédiène (USTHB), et président du Club des risques majeurs, a expliqué sur cette situation de stress hydrique que connait le pays.
« Dans les risques majeurs naturels il y a le volet risque désertification, sécheresse et canicule. C’est une grande problématique pour tout le pourtour méditerranéen » et de préciser que la sécheresse « c’est un déficit en pluviométrie (…) On vit ça depuis une vingtaine d’années en Algérie ».
Pour rappel, le déficit en pluviométrie est de 13% pour l’Est du pays, 12% pour le Centre et à plus de 20% à l’Ouest.
Selon une étude publiée dans la revue Advances le 13 août 2021, « Les feux de forêts, plus précisément la fumée qu’ils entraînent, « pourraient également être à l’origine d’une hausse des contaminations à la Covid-19 ». Les « incendies pourraient entraîner une augmentation des cas de Covid-19 car la fumée des feux de forêt serait un vecteur de transmission du coronavirus, comme l’a précis la même étude..
Le Dr Albert Rizzo, médecin-chef de l’American Lung Association, a indiqué, à la même période, que la pollution atmosphérique due à « la fumée des feux de forêt serait probablement responsable d’une inflammation des poumons » et de développer « Les particules sont à l’origine de la transformation des voies respiratoires en un terrain très fertile pour qu’une infection, comme la Covid-19, pénètre dans nos voies respiratoires. Le système immunitaire n’est préparé que pour essayer de lutter contre les effets d’une matière particulaire et maintenant il doit également se déclencher contre un virus ».
Il faut reconnaitre que depuis l’apparition de la pandémie, les autorités algériennes ont pris le taureau par les cornes. Mais, elles ont été vite dépassées par l’ampleur des dégâts : les hôpitaux saturés, le manque d’oxygène et un personnel soignant très affaibli. On notait alors, jusqu’à 100 décès par jour dans les infrastructures hospitalières.
Le déclenchement des incendies au centre du pays, notamment en Kabylie, ont mobilisé toutes les forces vives et les services, comme les professionnels de la santé, la protection civile (pompiers), services de sécurité. Si bien que le malades de Covid ont été négligés au profit des victimes d’incendies.
Depuis, à l’exception d’une période d’accalmie où tout emblait redevenir normal, le danger a re pointé avec le début de cette année.
Le directeur général de l’Institut Pasteur Algérie, Fawzi Derrar, a soutenu mardi qu’il était « fondamental » pour la population de revenir vers une adhésion « massive » à la vaccination et au respect « strict » des mesures barrières pour faire face efficacement à la pandémie du coronavirus (Covid-19).
Pour information, « 1359 nouveaux cas confirmés de coronavirus (Covid-19) et 8 décès ont été enregistrés ces dernières 24 heures en Algérie », indique mercredi le ministère de la Santé dans un communiqué.
En Kabylie, le taux de contamination par le virus du Corona a été le plus élevé, par rapport aux autres régions du pays : la wilaya de Béjaïa, qui enregistre l’un des taux de contamination les plus élevés du pays, et où deux médecins sont morts en deux jours durant le mois de décembre 2021, selon le site Slate.fr qui ne précise pas les chiffres exacts,
Conséquences, les incendies et le taux élevé des personnes atteintes de covid-19 ont impacté négativement toute une région vivant d’oléiculture et de culture d’olives. Un drame qui a enclenché une vague de solidarité des associations du reste du pays et de la diaspora à l’étranger.
L’association de promotion de la culture berbère, Numidya, accompagnée par deux associations jumelles originaire de Lyon, ont récolté des fonds pour les investir dans la replantation des oliviers, arbres symboliques de cette région hautement agricole.
“L’olivier, symbolise à la fois la Kabylie, la terre, le savoir-faire de nos ancêtres et un patrimoine qu’on nous a transmis. Il fait vivre les gens et nous voulions monter une opération durable”, explique la présidente de l’association Numidya, Malika Sidous.
Une véritable hécatombe.
C.B