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Entretien croisé de Hadja Moussa Barry & Aissatou Manet, deux footballeuses guinéennes !

Mois de mars, mois de la femme – Elles sont deux jeunes femmes pétries de talent et ont bravé les interdictions familiales pour s’abonner à leur passion : le football, « le sport des grands». Nonobstant «le manque de volonté des dirigeants guinéens» d’aider le football féminin à sortir de l’ornière pour être compétitif sur le plan continental, elles continuent de s’accrocher à leur rêve de jouer au plus haut niveau et «remporter des trophées collectifs et individuels». Elles, ce sont Hadja Moussa Barry et Aissatou Manet. Entretien croisé de ces deux joueuses guinéennes….

Présentez-vous aux lectrices et lecteurs du site panafricain d’informations générales, farafinainfo.com ?

Hadja Moussa Barry: Je m’appelle Hadja Moussa Barry, je suis née à Conakry précisément à Kaporo Rail, j’ai 19 ans et je suis footballeuse tantôt attaquante de pointe ou ailière droite, selon le bon vouloir de mon coach.

Aissatou Manet : Je me nomme Aissatou Manet, j’ai 24 ans et je suis titulaire d’un diplôme en Banque et finance de l’Université Général Lansana Conté Sonfonia. Je suis joueuse de Horoya Atlétic Club, dossard 8 et agente commerciale à Orange Guinée.

                       « la présélection de l’équipe nationale U-17 ans, j’ai délivré 4 passes décisives »

 Parlez-nous vos parcours footballistiques ?

Hadja Moussa B : J’ai commencé à jouer au foot depuis le bas-âge à Kaporo rail (banlieue de Conakry). Je jouais avec les filles et les garçons, à l’école ou ailleurs. En 2012, ma famille et moi avons déménagé à Sonfonia, j’ai passé une année ou presque sans pouvoir me trouver un club pour continuer à m’entraîner et à jouer des matches. Autant vous dire que je n’avais que l’école pour m’entraîner ou jouer les matches interclasses. En 2013, j’ai intégré  une équipe féminine de « bundesh » (petit champ) du nom de Racine Club Dimaria où j’ai joué 2ans. En 2015, cette équipe s’est associée à une autre de la place du nom de Wada, j’ai évolué sous les couleurs  de ce club jusqu’en 2018. Et le club a changé de nom devenant Académie Fac. L’année où j’ai été Capitaine, c’est le père de Marie Fac, artiste-rappeuse, était le président dudit Club. En 2019, nous avons effectué un voyage à (pour) Kindia (ville des agrumes) où nous avons joué 3 matches en autant de victoires et j’ai marqué 4 buts. Dès notre retour à Conakry, nous avons appris part à un tournoi organisé le coach Amara de C.O.R  et atteint les demi-finales. J’ai marqué 1 but pour sauver l’honneur. A la même année, j’ai été sélectionnée pour les jeux universitaires. J’ai joué pour l’Université Général Lansana Conté de Sonfonia. Et nous avons été éliminés en demi-finale. Lors de la présélection de l’équipe nationale U-17 ans, j’ai délivré 4 passes décisives. Je n’ai pas pu terminer le test pour cause de blessure au genou. J’ai été recruté par ASK (Association Sportive de Kaloum) version féminine, qui évolue présentement  en Ligue 2.

Aissatou M : J’ai commencé à jouer avec mes frères étant l’unique fille de ma mère Aminata Keita. Je partais souvent au terrain avec mes quatre frères. C’est ainsi que j’ai appris à jouer au ballon. Et le football est devenu ma passion.  J’ai voyagé et joué un peu partout en Guinée : Kankan, Kindia, Boffa, Fria…

Avez-vous rencontré des difficultés particulières à vos débuts si oui racontez-nous ?

Hadja Moussa B : Oui, avant la famille n’acceptait pas que je joué au football. Pour mes parents, le football, c’est pour les garçons. J’ai été frappée, insultée, maltraitée et dénigrée, mais ces traitements ne m’ont pas découragé, car pour moi, le football est plus qu’un simple jeu, c’est une passion. Je me cachais parfois pour aller aux entraînements et je me changeais au terrain et pour avoir le transport pour l’entraînement ou m’acheter des équipements, je préférais rester à l’école sans manger et économiser le montant de mon déjeuner pour ma passion.  Mes parents ne m’ont jamais donné de l’argent pour m’acheter des équipements depuis que j’ai commencé à jouer au football. Je le fais en serrant la ceinture plutôt mon ventre pour pouvoir subvenir à mes besoins équipements de football (Rires)

                                         «Il n’y a rien de plus beau que le football»

Aissatou M : J’ai rencontré beaucoup de difficultés, parce que ma mère ne voudrait pas que sa fille unique joue au football.  Malgré son opposition, je n’ai pas abandonné le football tout en poursuivant mes études. Elle m’a vu jouer les boundesh (Petit champ) et a pris la décision de m’envoyer à Horoya Atlétic Club (HAC)

Pourquoi avoir choisi le football pas un autre sport ?

Hadja Moussa B : Pour moi, le football est le sport des grands, c’est aussi une passion qui est devenue une obligation. Grâce à mon oncle, j’ai découvert de nombreux talentueux joueurs et aimé le football encore. Quand je vois  Ronaldo et Delphine Cascarino jouer, je me sens à l’aise et je me dis qu’il n’y a rien de plus beau que le football

 Aissatou M : J’ai toujours aimé le football. C’est ma passion. Et quand mes frères ont vu que j’avais du talent, ils m’ont beaucoup encouragé.

Quel était votre rêve en devenant footballeur ?

Hadja Moussa B : Mon rêve est de jouer au plus haut niveau et de représenter fièrement la patrie et remporter des trophées collectifs et individuels.

Aissatou M : Mon rêve était de finir mes études et de travailler dans la fonction publique pour le compte une banque. Et jouer pour le Syli National de Guinée faisait partie de mes rêves.

Jouer pour le Syli National faisait-il partie de votre rêve ?

Hadja Moussa B : Oui, c’est mon rêve de jouer pour le Syli National de Guinée

 Aissatou M : Jouer pour le Syli National de Guinée faisait partie de mes rêves

                                 « … nos entraîneurs se battent pour nous pour que »

Quel regard portez-vous sur le football guinéen ?

Hadja Moussa B : Il y’a beaucoup de filles talentueuses en Guinée. Et le football guinéen est en train de prendre l’ampleur. Si toutes les conditions nécessaires sont respectées, le football féminin guinéen peut-être au plus haut niveau, car la volonté et l’envie sont là. Le talent aussi. Le problème du football féminin guinéen, c’est le manque de volonté des dirigeants pour de booster  le sport féminin en général et le football féminin en particulier

Aissatou M : Le football guinéen n’est pas favorable pour nous, les joueuses. Nous ne sommes pas prises en charge. Nous ne participons qu’aux petits tournois dans les régions. C’est seulement nos entraîneurs qui se battent pour nous pour que nous soyons dans les normes et pour qu’on puisse avoir le minimum vital sportivement parlant.

                                          « Je ne peux pas parler d’avenir, car il est incertain »

 Quelles sont vos perspectives d’avenir ?

Hadja Moussa B : Je ne peux pas parler d’avenir, car il est incertain et très difficile surtout pour une femme qui veut jouer au football et qui a du talent mais sans aucun soutien  (financier). Mais je continue à espérer tout de même d’être au plus haut niveau mondial et jouer  grandes toutes les compétitions, surtout avoir le Ballon d’Or Africain pour donner de la force aux jeunes filles, qui rêvent de nous emboiter en devenant footballeuse.

Y’a-t-il des avantages à être footballeuse professionnelles en Guinée ?

Aissatou M : Ce n’est pas avantageux d’être joueuse professionnelle en République de Guinée ! Tu seras peut-être connue oui, mais tu ne seras pad bien payée. Vu l’évolution du football féminin en République de Guinée, c’est décourageant.

                « …nous avons joué 3 matches en autant de victoires et j’ai marqué 4 buts. »

Un souvenir inoubliable en tant que joueuse ?

Hadja Moussa B : Je n’oublierai pas mon déplacement à Kindia pour prendre part aux jeux universitaires en 2019, nous avons effectué un voyage à (pour) Kindia (ville des agrumes) où nous avons joué 3 matches en autant de victoires et j’ai marqué 4 buts.

Aissatou M : J’aimerais avoir un bon travail, avec lequel je pourrai subvenir à mes  besoins pour continuer à jouer tranquillement. Je ne vais jamais oublier les querelles en équipe, surtout au moment des finales et demi-finales. Ce sont des choses qui vous marquent : les joies et les rires des victoires.

Entretien réalisé par Odine Bikti